mardi 31 décembre 2013

Challenge ABC 2014

Après 52 lectures et bien des découvertes, je n'ai pas pu m'empêcher de rempiler pour leChallenge ABC en 2014! Néanmoins, j'ai décidé d'être plus raisonnable dans mes objectifs, afin de laisser davantage de place à mes envies et à l'imprévu. j'ai donc opté pour le demi-challenge proposé pour la première fois cette année.



Je le rappelle, le challenge ABC consiste à lire 26 titres, dont les auteurs commencent chacun par une lettre de l'alphabet différente. Avec le demi-challenge, il s'agit donc de lire 13 livres4 genres différents sont requis, et il faut lire au minimum 2400 pages2 bouleversements sont autorisés par rapport à la liste de départ.


Voici donc ma liste pour 2014 :

A comme...AUSTEN JanePersuasion, 316 p, Classique. Mon avis
B comme...BARJAVEL RenéLettre aux vivants qui souhaitent le rester, 174 p, EssaiMon avis.
C comme...COLIN FabriceBlue Jay Way, 552 p, ThrillerMon avis
D comme...DAUGHERTY CJNight School tome 3 : Rupture, 414 p, ThrillerMon avis.
E comme...ELKELES SimoneIrrésistible attraction, 409 p, RomanceMon avis.

F
G comme...GODBERSEN AnnaThe luxe tome 3 : Tricheuses, 432 p, HistoriqueMon avis.
H comme...HANDLER DanielInventaire après rupture, 368 p, Jeunesse. Avis à venir 

I
J comme...JALLIER FloMon plus grand combat, 238 p, ContemporaineMon avis.
K
L
M comme...MONING Karen MarieLes chroniques de Dani O'Malley, tome 1 : Iced, 603 p, Urban Fantasy. Mon avis.
N comme...NUNCQ EmmanuelleBordemarge, 318 p, Aventure/fantastiqueMon avis

O
P comme...PITCHER AnnabelCouleur ketchup, 311 p, Contemporaine. Mon avis
Q
R comme...ROTH VeronicaDivergent tome 3, 470 p., SF/Dystopie. Mon avis
S comme...SPOTWOOD JessicaSoeurs sorcières tome 1, 392 p, Fantastique/JeunesseMon avis

T
U
V
W
X
Y
Z

Je ferai le suivi de mon avancée dans le challenge sur cet article. Le top départ, c'est demain !

Score actuel : 13/13
Score visé : 13/13
Challenge terminé le 1/11/2014 !

samedi 28 décembre 2013

Revanche, de Cat Clarke : envoûtant, dérangeant et bouleversant


J’ai découvert Cat Clarke l’année dernière avec « Confusion », son premier roman traduit dans la Collection R de Robert Laffont. J’avais apprécié, même si j’avais trouvé le langage trop ordinaire et les ficelles un peu trop évidentes. Mais j’avais très envie de découvrir « Revanche » et lorsque je l’ai ouvert, les avis élogieux s’étaient déjà multipliés sur les blogs. Je risquais donc d’être déçue ! Mais ça n’a pas été le cas…

Résumé

Jem, 16 ans, est amoureuse de Kai, son voisin et meilleur ami, qui lui a avoué son homosexualité. La jeune fille s’en accommode, jusqu’au jour où une vidéo montrant Kai en plein ébat sexuel avec un garçon circule parmi les lycéens…provoquant le suicide de Kai. Jem se sent incapable de vivre sans son ami. Deux choses lui permettent de tenir debout : des lettres que Kai lui a laissées pour sa première année sans lui, et un profond désir de vengeance, de faire payer les auteurs de la vidéo…

Un roman bouleversant

Je dois vous avouer que je suis assez sensible et que je verse facilement ma petite larme en lisant. Mais ces derniers temps, je lis beaucoup dans le bus, alors je suis forcée de m’endurcir un peu ! Néanmoins j’ai été bien contente de lire la dernière partie de ce roman dans mon lit, parce que les larmes ont coulé. L’amitié que se vouent Kai et Jem est très touchante. Quant à la fin…on est sous tension tout au long du roman, à l’anticiper, à prier pour que tout ne soit pas gâché…mes nerfs ont fini par lâcher. C’est un roman envoûtant, que l’on n’a pas envie de refermer.

Un plat qui se mange froid

Pour éviter toute déception à la lecture, soyons clairs : ce roman ne traite pas d’homophobie ni même d’homosexualité, le sujet est quasiment absent. Non, ce roman traite principalement du suicide, et plus encore, de la vengeance. Ce désir de vengeance qui entraîne Jem dans une spirale infernale dont elle perd le contrôle, et qui emporte également le lecteur malgré lui. L’auteure nous montre ainsi les dangers de la vengeance, la manière dont on se perd soi-même et dont on passe à côté de belles choses lorsque l’on poursuit cette chimère.

Les personnages

Jem est un personnage qui n’a pas plu à tout le monde. En effet, son désir de vengeance l’aveugle et lui fait prendre de mauvaises décisions tout au long du roman, pour elle comme pour les autres. J’ai eu plusieurs fois envie de lui crier « ne gâche pas tout ! », mais elle ne m’a pas agacée, elle me faisait plutôt de la peine. Sa douleur fait d’elle un personnage supportable. Mais j’ai aussi apprécié les membres du Groupe Populaire, contrairement à Jem j’ai rapidement vu du bon en eux, et particulièrement en Lucas (Ai-je eu raison ? Cela, je ne vous le dirai pas !). J’ai aussi aimé Kai et la belle amitié qu’il témoigne à Jem dans ses lettres, même si je l’ai trouvé un peu « trop » dans sa manière de plaisanter sans cesse.

Le style

Ce titre m’a paru mieux écrit/traduit que Confusion, avec un langage un peu moins familier (mais il l’est quand même). Ou peut-être que j’ai fait moins attention, étant donné que j’étais prise par l’histoire. En tout cas l'ensemble est moins brouillon, plus affirmé. Néanmoins, sur la forme, pas mal de coquilles subsistent dans le livre, dont des grosses. C’est dommage, une correction un peu plus soigneuse n’aurait pas fait de mal à ce roman. Mais c’est une lecture agréable, même si je la déconseillerais aux moins de 15/16 ans en raison du langage et de la place importante accordée au sexe.

En quelques mots…

Ainsi, « Revanche » est un roman prenant et bouleversant, qui m’a maintenue sous tension tout au long de ma lecture, prise dans la spirale de la vengeance de Jem. Un livre que l’on rêverait de réécrire pour côtoyer un peu plus longtemps les personnages et les rendre heureux. Un titre qui a suscité l’émotion en moi et qui risque de me trotter dans la tête un bon bout de temps, ce pour quoi j’irai jusqu’à lui décerner un coup de cœur, malgré quelques imperfections.
Un grand merci à Babelio et à l’opération Masse critique pour cette lecture !

Note : 5/5 (Coup de cœur)

Stellabloggeuse

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Ce roman fait partie du challenge :


Challenge 100% R : 10e lecture

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« Les gens considèrent souvent le suicide comme un acte égoïste, et ça l’est peut-être, dans certains cas. Mais ce que Kai avait enduré était mille fois plus que ce que quelqu’un devrait se taper. Je ne lui ai jamais reproché son geste, pas vraiment. Ça m’a juste brisé le cœur de ne pas avoir su lui donner envie de rester ici. De tenir deux années de plus, le temps de quitter ce trou paumé pour aller tenter notre chance à Londres. C’était le plan. Ça avait toujours été le plan. »

« Peu à peu, Maman et Papa avaient arrêté de me traiter comme si j’allais me briser en mille morceaux. Vers la mi-décembre, ils avaient même recommencé à me casser les pieds avec les tâches ménagères et les devoirs. Noah semblait avoir épuisé son stock de regards prudents, mais polis, et ne loupait plus la moindre occasion de me signifier qu’il détestait ma nouvelle coiffure. […] Tout le monde avait paru estimer que la situation était redevenue normale. Personne ne s’était alors douté que le terme « normalité » n’avait plus eu aucun sens pour moi. Que la « normalité » avait volé en éclats sur des rochers sous un pont. »

samedi 21 décembre 2013

La nuit tombée, d’Antoine Choplin : des villages dans l’ombre de Tchernobyl


Dans le cadre de mon travail, j’ai découvert cet automne les éditions de la Fosse aux Ours, un petit éditeur lyonnais, un homme seul qui mène sa barque depuis 15 ans déjà en publiant 4 à 6 titres par an. « La nuit tombée » d’Antoine Choplin est le « best-seller » de la maison, et a notamment reçu le prix France Télévisions en 2012.

Résumé

Un peu plus de 2 ans après l’explosion de la centrale nucléaire de Tchernobyl, Gouri, qui s’est exilé à Kiev avec sa famille, revient dans les villages jouxtant l’ancienne centrale. Il rend visite à des amis qui sont restés là envers et contre tout, malgré la maladie qui commence à frapper. Il prévoit d’attendre la nuit pour s’introduire dans la zone interdite, au plus près de la centrale, et rejoindre le village de Pripiat pour retourner dans l’appartement qu’il habitait au moment du drame.

Une ambiance particulière

Je ne sais pas si l’auteur a voyagé en Ukraine pour écrire son roman, mais ce qui est certain, c’est que l’on a l’impression d’y être. Il restitue pour nous le silence qui plane sur les villages qui entourent la centrale, la désolation des maisons abandonnées, l’épaisseur de l’air avec ce « je ne sais quoi » qui s’insinue dans tout votre être, les pillards qui continuent à rôder au péril de leur vie. Cela donne un roman à l’ambiance très particulière, qui m’a beaucoup plue.

Un roman lumineux

Malgré le sujet et la mort qui plane au-dessus des personnages, je n’ai pas trouvé ce roman pesant. Au contraire, il est lumineux, très humain. En effet, autour de Tchernobyl, la vie continue envers et contre tout. Ceux qui sont restés, désormais isolés, combattent la maladie comme ils le peuvent, s’entraident, profitent du temps qui leur reste et ravivent les beaux souvenirs.

Les personnages

Les personnages de ce roman sont pour la plupart en sursis. Après l’explosion, les hommes ont été enrôlés pour enfouir les retombées nucléaires dans la terre, au nom du patriotisme et de la promesse d’une grosse rétribution. Certains sont déjà malades, comme Iakov, d’autres attendent d’être rattrapés. Gouri, lui, s’en est allé quelques jours après l’accident, et on ressent chez lui une certaine culpabilité de les avoir abandonnés. Mais il n’est pas épargné non plus puisque sa fille Ksenia est très malade. J’ai été particulièrement touchée par Iakov qui, aux portes de la mort, se soucie encore de musique et de poésie, et de réussir à dire à sa femme combien il l’aime.

L’écriture

J’ai été séduite par l’écriture d’Antoine Choplin, qui est sensible et poétique. Son style suscite l’émotion, tout en retenue, sans jamais tomber dans un ton larmoyant. C’est une écriture délicate, qui est dans la suggestion. Les descriptions m’ont vraiment parlé, j’ai pu me figurer les paysages de Pripiat.

En quelques mots…

Ainsi, j’ai été séduite par ce roman qui s’intéresse aux villages qui survivent tant bien que mal aux environs immédiats de Tchernobyl, au bord de la zone interdite. Il est porté par des personnages très humains et une écriture qui suscite avec délicatesse une émotion puissante. Je lirai volontiers un autre titre de cet auteur, et je vous conseille celui-ci sans hésiter !

Note : 4/5

Stellabloggeuse

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« -Eh bien, il dit d’une voix hésitante, comment dire, je sais que mes jours sont comptés.
Gouri prend une inspiration comme pour dire quelque chose mais finalement, il reste silencieux.
-Avant de partir, poursuit Iakov, j’aimerais pouvoir dire un mot ou deux à Véra.
-Un mot ou deux ?
-Oui, tu vois, je voudrais lui dire, je sais pas moi, combien elle a compté pour moi dans cette vie d’ici-bas, et combien elle a été bonne pour moi toutes ces années et comme elle a fait de moi quelqu’un de meilleur que si je l’avais pas connue. J’ai envie de la remercier pour ça. Et aussi d’autres choses. J’ai plusieurs fois essayé de le faire comme ça, avec la parole. Mais je sais pas pourquoi, ça veut pas venir. Alors je me suis dit, tiens, peut-être que Gouri, il pourrait m’aider à écrire ça comme il faut. »

« Au début, quand tu te promènes dans Pripiat, la seule chose que tu vois, c’est la ville morte. La ville fantôme. Les immeubles vides, les herbes qui poussent dans les fissures du béton. Toutes ces rues abandonnées. Au début, c’est ça qui te prend les tripes. Mais avec le temps, ce qui finit par te sauter en premier à la figure, ce serait plutôt cette sorte de jus qui suinte de partout, comme quelque chose qui palpiterait encore. Quelque chose de bien vivant et c’est ça qui te colle la trouille. Ça, c’est une vraie poisse, un truc qui t’attrape partout. »

mardi 17 décembre 2013

Ce qu’ils n’ont pas pu nous prendre, de Ruta Sepetys : poignant et touchant


"Ce qu'ils n'ont pas pu nous prendre" de Ruta Sepetys est un livre que je souhaitais découvrir depuis longtemps, notamment depuis qu’il m’a été recommandé par ma copinaute Juliah dont les conseils sont toujours judicieux ! Les challenges 2013 ont été l’occasion de concrétiser enfin cette envie, toujours grâce à Juliah qui m’a prêté son livre !

Résumé

Un matin de l’année 1941, alors que l’été n’a pas encore touché à sa fin, Lina et sa famille sont arrêtés aux aurores, en pyjama, dans leur maison au sein d’une petite ville de Lituanie. Le NKVD, la police secrète russe, les embarque dans des trains et des camions sous une infâme accusation, celle d’être des criminels et des prostituées. En vérité, ce sont seulement des intellectuels craints par le régime soviétique. Ils sont déportés en Sibérie. Lina, sa mère, son petit frère et quelques voisins sont intégrés à un kolkhoze où ils travaillent la terre en échange d’une petite portion de pain. Malgré la terreur semée par le NKVD, les privations et la maladie, Lina garde sa dignité et témoigne par ses dessins des terribles heures qu’elle vit. Elle rencontre Andrius, animé de la même colère qu’elle…

Un pan méconnu de l’Histoire

L’auteure met ici en lumière un pan de l’Histoire encore méconnu, celui de la déportation russe. Lors de la Seconde Guerre Mondiale, l’URSS a envahi les Etats Baltes et la Finlande et les a annexés à son territoire. Les personnalités susceptibles de poser problèmes, et notamment les intellectuels, ont été envoyés en Sibérie où ils sont restés pour au moins une décennie de travaux forcés, sans que le reste du monde n’en sache rien. Et, comme l’explique Ruta Sepetys dans la postface, lorsque les survivants ont enfin pu rentrer chez eux, ils ont du taire leur calvaire jusqu’à la chute de l’URSS, en 1991. J’ai donc trouvé que c’était une très belle idée de faire connaître cette déportation, moins connue que celle pratiquée par les allemands, par le biais d’un roman.

Un roman prenant et poignant

J’ai dévoré ce roman à une vitesse que je n’avais pas connue depuis longtemps ! C’est bien simple, j’avais beaucoup de mal à le reposer pour faire autre chose tant j’ai été embarquée par la destinée de Lina et de ses compagnons. Il y a dans ce livre beaucoup de souffrance, le NKVD procédant à une véritable destruction psychologique sous forme d’humiliations, de peur, de privations, d’épuisement. Et pourtant, les personnages gardent leur dignité, la seule chose que l’on ne pourra pas leur prendre. Il y a dans ce roman beaucoup de courage et une envie de vivre qui dépasse tout, y compris la colère.

Les personnages

Le roman est porté par des personnages très attachants, à commencer par Lina qui a un caractère de feu. Même si elle doit se taire pour éviter la mort, on sent en elle une révolte profonde, jamais elle n’a douté d’elle-même et jamais son esprit ne s’est soumis aux russes. J’ai également eu beaucoup de sympathie pour son petit frère, Jonas, âgé de 10 ans à peine, qui grandit en accéléré et devient un homme en quelques semaines à peine. J’ai également apprécié Andrius, même si j’ai eu l’impression de moins le connaître que les autres. Dès le début, il reste fort et montre la voie aux autres. Bien sûr tous les Lituaniens ne sont pas des gens bien, l’égoïste et geignard Mr Stalas le prouve. De même, tous les russes ne sont pas à mettre dans le même panier, certains sont dépassés et tentent d’aider à leur façon.

L’écriture

J’ai trouvé le style agréable, la traduction est fluide. Il y a dans l’écriture beaucoup d’émotion, mais aussi de la retenue, aucun apitoiement. Ruta Sepetys intègre également des références très intéressantes à l’art, et notamment aux dessins de Munch. J’ai donc passé un très bon moment et je lirai son second roman avec plaisir.

En quelques mots

Ainsi, Ruta Sepetys a écrit un roman poignant et touchant qui met en lumière un pan méconnu de l’Histoire, celui de la déportation russe. L’histoire de Lina et de ses compagnons est très émouvante, sans apitoiement pour autant. Ce qui ressort avant tout, c’est une formidable envie de vivre, et une dignité qui illumine tout le roman. J’ai été conquise et je vous le recommande volontiers.

Note : 5/5 (Coup de cœur)

Stellabloggeuse
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Ce roman fait partie des challenges :


Big Challenge Livraddict 2013 : 10/10



Baby challenge jeunesse 2013 : 12/20

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« Il resta immobile quelques instants, après quoi, il se mit à frapper les marques à coups de pierre – de plus en plus violemment. Il cognait le plancher du wagon avec tant de force que je craignais qu’il ne se brisât la main. Je m’avançai vers lui. Andrius m’arrêta.
-Laisse-le faire, dit-il.
Je le regardai, incertaine.
-Mieux vaut qu’il s’y habitue, ajouta-t-il.
Qu’il s’habitue à quoi ? A être possédé par de folles colères ? Ou à ressentir une tristesse insondable, comme si le cœur même de votre être avait été arraché pour vous être ensuite resservi dans un seau crasseux ? »

« Les questions de Mr Stalas que je ne cessais de retourner dans ma tête m’avait tenue éveillée ? Etait-il plus difficile de mourir ou de survivre ? J’avais à peine seize ans, je n’étais qu’une petite orpheline perdue aux confins de la Sibérie, mais je connaissais la réponse. C’était même la seule chose dont je n’avais jamais douté. Je voulais vivre. Je voulais voir mon frère grandir. Je voulais revoir la Lituanie. Je voulais respirer l’odeur du muguet que la brise transportait jusque sous ma fenêtre. Je voulais peindre dehors, dans les prés. Je voulais revoir Andrius avec mes dessins. Il n’y avait que deux issues possibles en Sibérie : ou bien survivre, c’est-à-dire réussir, ou bien mourir, autrement dit échouer. J’avais choisi la vie. J’avais choisi de survivre. »

samedi 14 décembre 2013

Zelda la rouge, de Martine Pouchain : un roman tendre et humain

[Sarbacane, collection eXprim’, 2013]

La fin du mois de septembre 2013 a vu la publication d’un nouveau roman de Martine Pouchain, « Zelda la rouge », avec une couverture jaune pétante qui ne peut qu’attirer l’œil et un « pitch » qui intrigue. C’est donc avec enthousiasme que je l’ai reçu et dévoré !

Résumé

Zelda et Julie sont sœurs. La première, âgée de 16 ans, est en fauteuil roulant depuis ses dix ans, lorsqu’une voiture l’a renversée avant de prendre la fuite. La seconde, âgée de 20 ans, a suivi une formation d’aide-soignante pour subvenir aux besoins de sa petite sœur et travaille désormais en maison de retraite. Si Zelda positive dès qu’elle en a l’occasion et croque la vie à pleine dents, Julie est habitée par la culpabilité de l’accident et surtout, par un désir de vengeance. Orphelines de mère, elles vivent dans une bicoque léguée par leur grand-mère, qu’elles partagent avec Kathy, une femme de ménage d’une cinquantaine d’années et Jojo, un ancien SDF. Mais quand Baptiste entre dans leurs vies, cet équilibre vacille…

Un roman très humain

La première chose à savoir concernant ce roman, c’est que ce n’est pas un roman sur la condition de handicapé. Le handicap est bien sûr présent, Zelda évoquant avec beaucoup de philosophie certaines particularités de son existence. Mais c’est avant tout l’histoire de deux sœurs qui s’aiment très fort et qui essaient d’être heureuses malgré les aléas de l’existence. Il y a beaucoup d’humanité dans ce roman, beaucoup de tendresse entre les personnages. Malgré les deuils récurrents (Julie travaillant dans une maison de retraite), il y a dans cette histoire un formidable élan de vie et beaucoup de bonne humeur.

De multiples thèmes

En plus du handicap, de nombreux thèmes sont évoqués dans ce roman. Il y a tout d’abord la vengeance, personnifiée par Julie. Zelda se positionne également contre le nucléaire lorsqu’elle apprend que Baptiste travaille dans des centrales. Elle veut devenir femme politique pour éveiller les consciences, à l’image de « Danny le rouge », d’où le titre du roman. La vieillesse et la mort sont également très présentes, via le métier de Julie et ses talents de medium. Enfin, une part est également faite à l’amour dans ce roman.

Les personnages

Les personnages sont le point fort de ce roman. Zelda est un petit rayon de soleil, pleine de sagesse. On ne peut que l’apprécier et l’admirer. Malgré son côté solaire, elle a aussi ses doutes et ses problèmes, elle s’interroge par exemple sur sa capacité à aimer. Cela ne la rend que plus attachante. Quant à Julie, c’est un bouledogue au cœur tendre, toujours prête à râler ou à mordre, mais avec un grand cœur, prompte à défendre la veuve et l’orphelin (ou dans ce cas précis sa petite sœur et des personnes âgées pas toujours bien traitée). Ses démons intérieurs donnent envie de la protéger. J’ai également eu beaucoup de sympathie pour leurs colocataires, Kathy et Jojo, ou pour Selim, le meilleur ami de Zelda.

L’écriture

L’écriture de Martine Pouchain est un régal dans ce roman, dynamique, drôle et tendre. Elle alterne les points de vue des deux sœurs avec talent, en leur donnant à chacune une personnalité bien à elle. J’ai pris beaucoup de plaisir à lire ce roman.

En quelques mots…

Ainsi, j’ai beaucoup aimé cette histoire de sœurs tendre et humaine, drôle et profonde ; Le roman est porté par des personnages extrêmement attachant et nous fait voir le handicap sous un œil différent. C’est également un titre qui peut faire réfléchir les adolescents (ou les plus grands) en douceur sur la vieillesse, la mort, ou l’impasse du nucléaire. Malgré son thème de départ c’est un livre lumineux, qui donne le sourire et l’envie de croquer la vie à pleines dents, comme Zelda. Un grand merci à Claire des éditions Sarbacane pour cette lecture !

Note : 4,5/5

Stellabloggeuse

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« Moi aussi je m’en souviendrai toujours, je peux pas faire autrement. Mais j’ai eu tant à me battre qu’il ne m’est pas resté de place pour la haine. Alors j’ai arrêté de me focaliser sur les causes auxquelles je ne pouvais rien changer, pour m’intéresser aux effets que je pouvais améliorer. Je suppose que c’est une des rares circonstances où les effets sont plus importants que les causes. Aujourd’hui, j’ai envie de dévorer la vie et un appétit d’ogre que tout intéresse : les choses, les lieux, les gens. Je suis redevenue apte aux grands moments. Vous savez, ces moments que les gens appellent des petits bonheurs ? Il y a un truc primordial qui jamais ne les effleure, c’est que le bonheur ne peut pas être petit. Jamais. »

« Du coup, j’aime autant lui abattre tout de suite ma couleur, je suis contre le nucléaire. C’est même une des raisons pour lesquelles je veux faire de la politique, vu qu’il n’y en a pas un qui est foutu de se coller sérieusement à cette urgence capitale. Danny le rouge pousse bien de temps à autre une gueulante avec sa voix sucrée, mais ça reste théorique. Et il n’y a personne pour hurler qu’on fabrique les barreaux de notre prison avec une bombe à retardement planquer juste sous nos pieds pour nous faire sauter à n’importe quel moment ! Je lui dis aussi que plus tard je me ferai appeler Zelda la rouge et j’esbrouferai les gens pour qu’ils m’écoutent, vu que ce qu’ils veulent avant tout, c’est du spectacle. A l’époque de Jésus, déjà. Une fois appâtés, ils deviennent plus attentifs et on peut commencer à parler sérieusement. »

« Je ne sais plus où j’ai entendu dire que quand on aime quelqu’un, on est certain de le perdre un jour. Parce qu’il partira, ou qu’il mourra, ou alors c’est nous. Ça peut paraître déprimant si on oublie que c’est aussi une manière de souligner que l’instant est précieux. Infiniment plus ordinaire qu’un diamant, et infiniment plus précieux. »

mardi 10 décembre 2013

La dernière guerre, tome 2, de Fabrice Colin : Seconde vie

[Michel Lafon, 2013]

*Attention, il s’agit du second tome d’une saga, présence de spoilers sur le tome précédent*

Souvenez-vous, l’année dernière, j’avais beaucoup aimé « 49 jours », de Fabrice Colin, premier tome d’un dyptique à l’atmosphère de fin du monde intitulé « La dernière guerre ». J’avais beaucoup apprécié ce roman au carrefour de la fantasy et de la science-fiction. Aussi, j’étais impatiente de découvrir « Seconde vie », le second et dernier volet de la série.

Résumé

Rain a quitté Paris pour se rendre à Saint Gervais en Haute Savoie, où Floryan lui a donné rendez-vous devant une chapelle. Elle s’installe au sein d’un groupe de rescapés, dans une zone contrôlée par l’armée rouge. Mais deux garçons peuvent être potentiellement la réincarnation de Floryan : Anthony et Elliot. Finalement, c’est tous ensemble qu’ils essaieront d’enrayer la fin du monde et de retrouver la trace de l’antidote qui permettrait aux femmes d’avoir de nouveau des enfants.

Un roman plus orienté SF

Dans le premier tome, l’auteur s’amusait à brouiller les frontières entre les genres. Ici, ce n’est pas du tout le cas. En effet, la quasi-totalité de l’intrigue se déroule sur Terre, seules quelques pages sont consacrées à l’Intermonde ou Monde Second, l’aspect « fantasy » est donc absent. Nous sommes ici dans un roman davantage orienté science-fiction, avec entre autres un train ultrafuturiste qui traverse l’Atlantique ou des techniques de « hacking » étonnantes.

Une intrigue inégale

Il m’a semblé que l’intrigue mettait du temps à démarrer véritablement. Le problème, me semble-t-il, tient à ce que l’histoire est racontée du point de vue de Rain. Cela oblige Eliott, qui se prétend la réincarnation de Floryan, à résumer l’ensemble de sa vie, ce qu’il fait dans un texte que Rain lit sur une tablette numérique. Tout cela m’a semblé assez fastidieux. Après 200 pages, l’action décolle enfin et j’ai tourné les pages avec une plus grande hâte, même si dans l’ensemble, je pense que l’histoire aurait été plus palpitante racontée du point de vue d’Eliott.

Néanmoins, je dois dire que la fin m’a frustrée, dans le sens où ce n’est pas une « vraie fin » : l’auteur se contente de faire un bond dans les temps de quelques semaines, et de résumer sur deux pages le dénouement de l’intrigue, comme s’il avait créé une intrigue trop complexe pour arriver à la résoudre assez rapidement. J’aurais pourtant préféré une vraie fin, imaginative et fouillée, quitte à ce que le roman fasse 600 pages.

Les personnages

Rain est une jeune fille plutôt sympathique, mais je ne me suis pas véritablement attachée à elle. Il m’a été assez difficile d’adhérer à son point de vue après avoir été habituée à celui de Floryan, elle m’est restée assez étrangère, je n’ai pas l’impression de vraiment la connaître. J’ai eu beaucoup plus d’affection pour Eliott, la tête brûlée, prêt à tout pour contrecarrer les plans des Elohims. Quant à Anthony, il m’a agacée, à part créer un triangle amoureux, je n’ai pas bien saisi l’utilité de son personnage.

L’écriture 

En tout cas, j’ai retrouvé avec plaisir la plume de Fabrice Colin, très agréable. La fantasy étant absente, il y a moins de belles « envolées » dans ce tome, mais son écriture reste intéressante tout en étant abordable pour des adolescents.

En quelques mots…

Ainsi, j’ai passé un bon moment avec ce roman de science-fiction qui, après un démarrage un peu poussif, devient très intéressant. Mais je dois m’avouer un peu déçue, principalement parce que le premier tome était excellent, et que celui-ci n’est malheureusement pas aussi bon, peut-être écrit un peu trop vite. Mes deux principaux regrets sont que l’on n’ait pas gardé le point de vue de Floryan et que la fin soit trop rapide. Cependant, cela reste un bon roman et je remercie les éditions Michel Lafon pour cette lecture. Et je compte bien continuer à découvrir Fabrice Colin, et notamment ses romans policiers, l'année prochaine.

Note : 3,5/5

Stellabloggeuse

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« Beaucoup de nos semblables ont cru que le monde périrait avec eux. Pense aux Romains lors des invasions barbares, par exemple. Aux juifs pendant l’Holocauste. Aux Russes déportés par Staline. Nous sommes tous des histoires, conclut-il. Des malheurs en mouvement. Et pourtant, nous avançons. »

« Il était de bon ton, à cette époque (et je me souviens de discussions entre leurs amis, des conversations sérieuses qu’ils me pensaient sans doute trop jeune pour comprendre), de se montrer réservé à l’égard de l’idée même d’enfant. « Quel avenir avons-nous à leur offrir ? » répétait mon père. Mais c’était prendre le problème à l’envers. Le monde de demain, ce sont les enfants qui le fabriquent. « Regardez ! ai-je envie de crier à ce couple maussade sur le trottoir, à cet ado maigrichon voûté sur son smartphone, à cette vieille femme qui grimace en portant ses courses, regardez, et écoutez : il manque quelque chose, vous ne vous en rendez pas compte ? Il manque les rires et l’insouciance, les sprints fous et les bouderies, il manque les larmes de crocodile, la magie et les bulles de savon, et nous allons mourir de toute cette tristesse, le monde ne se fera pas sans eux. »

« Mais regarde le monde. Regarde les guerres, les vagues géantes, les révolutions. Nous sommes ici, près d’une petite maison dans les bois, avec un homme qui détient la clé de l’avenir du monde et que nous sommes seuls à connaître. Pourquoi nous priverions-nous d’être fous ? »