mercredi 28 octobre 2015

Will & Will, de John Green et David Levithan : tendre et jubilatoire


"Will & Will", c’était en théorie pour moi le mélange parfait ! La rencontre de John Green – dont j’ai adoré l’émouvant « Nos étoiles contraires » et apprécié « Le théorème des Katherine » - et de David Levithan – dont j’ai beaucoup aimé « A comme aujourd’hui » et apprécié « Invisibilité ». Auront-ils répondu à mes attentes ? Réponse ci-dessous !

Résumé

A Chicago, Will Grayson a pour meilleur ami l’encombrant Tiny Cooper, un géant 100% qui a décidé de s’assumer pleinement, notamment au travers d’une comédie musicale. Pour sa part, Will Grayson a deux grands principes : ne pas s’impliquer émotionnellement et se taire, deux résolutions bientôt mises à mal. A l’autre bout de la ville vit un autre Will Grayson. Celui-ci aime les garçons et souffre en silence, carburant aux médicaments et au cynisme. Et si leur rencontre pouvait les changer à jamais ?

Jubilation et émotion

Je ne fais pas durer le suspense davantage, j’ai beaucoup aimé le mélange de ces deux auteurs ! Les deux personnages s’expriment alternativement, au rythme d’un chapitre chacun. Avec le premier Will, sous lequel il me semble deviner John Green, on rit et on jubile, on est dans une comédie qui fonctionne bien. Avec le second, issu par conséquence de David Levithan, on est dans une introspection plus douloureuse, une chenille en souffrance qui attend de devenir papillon et qui apporte au roman de vives émotions.

Energie vitale et tendresse

Il faut le reconnaître, l’intrigue n’est pas 100% crédible. Mais je choisis de retenir avant tout l’énergie vitale et la tendresse qui s’en dégagent, et qui en font un livre qui fait du bien. Et même si on sent que les deux auteurs  s’amusent et que l’on n’est plus tout à fait dans la vie de tous les jours, les émotions sont quant à elles bien réelles, tout comme les réflexions sur les sentiments, la relation aux autres et l’homosexualité. Comme dans une comédie musicale (j’ai parfois pensé à la série « Glee » pendant ma lecture), au final : c’est brillant et divertissant, mais il y a un fond de vérité.

Les personnages

Les personnages, très attachants, sont clairement le point fort du roman. Le premier Will est un gentil trouillard qui a peur de s’impliquer dans ses relations avec les autres, jusqu’à en être égocentrique. Mais il a bon fond et j’ai apprécié son évolution. Le second Will est un écorché vif persuadé que tout est voué à l’échec, ce qui ne l’empêche pas de se prendre au jeu de l’amour. Ce personnage m’a vraiment touchée. Mais la vraie star du roman, c’est Tiny Cooper, son assurance et ses extravagances qui dissimulent ses complexes et sa fragilité, un personnage assez inoubliable !

L’écriture

En ce qui concerne le style, il est plutôt simple. Le premier Will s’exprime comme n’importe quel lycéen, de façon crédible (pas comme quand, parfois, on sent que les auteurs « jouent » à faire parler des adolescents). Le second a un style un peu télégraphique, tout en minuscule avec des phrases courtes, comme pour éviter de trop en dire, de trop se dévoiler.

En quelques mots…

Ainsi, je suis tombée sous le charme de ce roman aux airs de comédie (musicale), drôle et léger, parfois jubilatoire, mais aussi riche en émotions et en vérités. Il est porté par des personnages attachants que l’on regrette de quitter si vite. A découvrir à partir de 14 ans !

Note : 4/5
Stellabloggeuse
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« Ok, je sais que ce n’est pas très viril de ma part. Je sais que les vrais mecs ne devraient penser qu’au sexe et à conclure avec les meufs, qu’ils devraient se jeter braguette au vent sur tout ce qui bouge dès qu’ils ont un ticket, etc. Mais moi, ce qui m’intéresse, ce n’est pas tant le passage à l’acte que la phase de découverte. Découvrir pour la première fois qu’elle sent le café trop sucré, découvrir la différence entre son vrai sourire et celui sur les photos, sa manie de se mordiller la lèvre inférieure ou la peau pâle de son dos. Je voudrais juste pouvoir savourer ces petites découvertes de loin, bien planqué dans mon coin, sans me l’avouer officiellement. »

« Moi donnant des conseils sentimentaux à ma mère, c’est comme si un poisson rouge expliquait à un escargot comment voler. »

« N’empêche, que suis-je sensé lui dire ? Que je ne me sens pas juste déprimé – que j’ai plutôt l’impression que la dépression me ronge de l’intérieur, centimètre par centimètre, depuis le fond de mon âme jusqu’au creux de mes os ? Que quand lui voit tout en gris, je vois tout en noir foncé ? Que je hais mes médocs car je sais à quel point j’en ai besoin pour vivre ? »
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Ce roman fait partie du challenge :

New Pal 2015 : 14/75

samedi 24 octobre 2015

Colomb de la lune, de René Barjavel : entre délire SF et métaphore amoureuse

[Denoël, 1962]

Si vous suivez un peu ce blog ou que vous me connaissez un tout petit peu, vous connaissez sans doute mon amour pour René Barjavel, ses idées folles et son ton de conteur. « La Nuit des temps » reste mon livre préféré, et j’ai adoré son autobiographie « La charrette bleue ». J’ai également apprécié « L’enchanteur », ou « Lettre ouverte aux vivants ». En général, j’essaie d’en lire un par an, pour avancer dans sa bibliographie sans me trouver trop rapidement démunie ! Cet automne, ce fut donc le tour de « Colomb de la lune »…

Résumé

Pour la première fois, un homme a une réelle chance de poser le pied sur la Lune. Le lunaire Colomb s’apprête en effet à embarquer dans une fusée tout en légèreté ou en ingéniosité. Il laisse derrière lui sa femme, qui vivra une aventure peut-être encore plus intense que la sienne…

Délire futuriste et histoire d’amour

Il est très difficile pour moi de parler de cet Ovni qu’est « Colomb de la lune » ! C’est clairement le Barjavel le plus barré que j’ai pu lire jusqu’à présent, un délire futuriste que j’ai parfois eu du mal à suivre. Mais soulignons une fois de plus le visionnaire Barjavel, qui en 1962 mettait déjà l’homme sur la Lune !

Pour le reste, pas de Barjavel sans histoire d’amour passionnelle, évidemment. Il est aussi beaucoup question des enfants, car il est question d’avenir. Dans l’ensemble, cette histoire-là m’aura moins touchée que d’autres romans de l’auteur. Mais même si j’ai parfois eu du mal à suivre Barjavel dans la folie de cette aventure lunaire, j’ai apprécié la métaphore, et la manière dont les différents pan de l’histoire se retrouvent liés à la fin du roman et prennent tout leur sens.

Les personnages

Colomb est un personnage lunaire, qui cherche à poursuivre son rêve au sens propre du terme. Rien ne semble le retenir sur Terre, pas même son mariage. Il aspire à une autre forme de plénitude. Sa femme, Marthe, est charnelle et bouillonnante. Quant à Suzanne, la sœur de Colomb, je n’ai pas adhéré à son personnage d’artiste, un peu trop cliché.

L’écriture

Quant au style, je n’ai pas retrouvé ce ton de conteur bien particulier de Barjavel, que l’on a dans « L’enchanteur » ou dans « La charrette bleue ». Ici il se fait plus dur, plus féroce avec ces personnages dont il expose les travers sans prendre de gants. Je le préfère plus doux, même si ce ton se justifie par l’histoire qu’il raconte.

En quelques mots…

Ainsi, pour l’instant je dirais que c’est le titre de René Barjavel que j’ai le moins apprécié, sur neuf lus. J’ai eu un peu de mal à le suivre dans la folie de ce voyage dans l’espace et de cette histoire d’amour qu’il nous raconte. J’ai néanmoins apprécié la métaphore qui sous-tend le roman, et la manière dont il trouve un sens en le refermant. Vivement l’an prochain pour en découvrir un nouveau !

Note : 3/5
Stellabloggeuse
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« La surface de la Lune ressemble à une croûte de pain mal levé, trop cuit. Granuleuse, brunâtre. Depuis des milliards d’années, il pleut sur la Lune des météorites de toutes tailles, billes, grains de poivre, grains de poussière, et encore plus petits, des mondes d’infimes microscopiques. Il n’y a pas d’atmosphère pour les freiner et les brûler. Petites et grosses, les météorites percutent la Lune du plein fouet de leur vitesse cosmique. La chaleur du choc les fait fondre en partie, couler, se coller à celles qui sont déjà là agglomérées, collées. Les plus grosses s’enfoncent, parfois explosent, creusent un cratère, jettent au loin en cercle les débris. Et sur les débris aigus de l’explosion, la poussière du ciel de nouveau déjà tombe, colmate, arrondit les angles, comble le fond des trous. La Lune est un monstre de poussière. »


« Nous pouvons en déclencher l’explosion par radio. C’est une toute petite bombe, mais suffisante. Juste de quoi lui briser le coeur. »
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Ce roman fait partie du challenge :


New Pal 2015 : 13/75

mercredi 21 octobre 2015

A comme association, tome 4, de Pierre Bottero : Le subtil parfum du soufre


*Attention, il s’agit du tome 4 d’une série, présence de spoilers sur les tomes précédents.*

Depuis quelques mois, je grignote un à un les tomes de « A comme association » du tandem Erik L’Homme / Pierre Bottero, pas trop vite, car il n’y en a que huit… J’avais particulièrement apprécié ma découverte d’Ombe dans le tome 2, j’étais donc curieuse de la retrouver ici. Et j’ai bien sûr ouvert ce tome 4 avec un sentiment tout particulier, un pincement au cœur, sachant qu’il s’agit du dernier titre écrit par Pierre Bottero, envoyé à son acolyte deux jours avant sa mort…

Résumé

Après sa mission un brin tapageuse auprès des gobelins, Ombe est chargée par l’Association de recueillir des informations sur un mystérieux trafic de drogue, orchestré par les vampires et assuré par les garous… En toute discrétion évidemment, ce qui, avouons-le, n’est pas sa spécialité ! Mais c’est un tout autre piège qui guette Ombe…celui de l’amour. Et si son corps est incassable, ce n’est peut-être pas valable pour son cœur…

Rythme et humour

Sur le plan de l’intrigue, on en apprend un petit peu plus sur le trafic de drogue qui affecte le comportement des anormaux, et sur celui qui tire les ficelles. Beaucoup de questions demeurent encore, mais il reste quatre autres tomes pour les éclaircir. L’histoire est contée sur le même mode que dans les tomes précédents : du rythme et de l’autodérision. Impossible de résister à ce mélange, les pages se tournent toutes seules !

Un tome émouvant

Ce tome est pour moi le plus abouti des quatre premiers, et le plus émouvant également. Le fait que l’on ne puisse s’empêcher de penser à l’accident de Pierre Bottero chaque fois qu’Ombe enfourche sa moto n’y est pas pour rien. Sans parler de ce final qui vous prend à la gorge rétrospectivement… Néanmoins, il y a autre chose d’émouvant dans ce roman. Pour la première fois, on délaisse le côté léger de l’intrigue fantastique pour pénétrer au cœur des sentiments d’Ombe, et on n’en ressort pas indemne. On vit avec elle la beauté et la dévastation du sentiment amoureux.

Les personnages

Le personnage d’Ombe, qui se dévoile enfin, est pour beaucoup dans l’intensité de ce tome. Elle nous laisse voir ses failles, ses doutes, au travers de sa carapace qui se fissure. On comprend mieux sa difficulté à se lier aux autres, et on voudrait apaiser sa solitude. C’est un personnage très touchant, que je vais avoir du mal à laisser partir.

L’écriture

Que dire ? Bottero is Bottero (et non, je ne me résigne pas à employer le passé). C’est fluide, c’est beau, c’est drôle, c’est réaliste dans les dialogues, c’est précis dans les descriptions. C’est du bonheur, en somme.

En quelques mots…

Ainsi, c’est un tome qui continue dans la lignée des trois précédents, avec une intrigue fantastique menée tambour battant avec beaucoup d’humour, et cette écriture envoûtante. Mais c’est surtout un tome doublement émouvant, de par la fragilité d’Ombe, et ce sentiment de fin qui étreindra tout admirateur du grand Pierre Bottero. Lire ce 4e tome à l’aube du 6e anniversaire de sa mort était aussi un moyen de lui rendre hommage. Merci l’artiste !

Note : 4,5/5
Stellabloggeuse
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« -M’en fous ! La prochaine fois je lui pèterai la gueule !
-C’est pour ça que je pense que tu as le diable en toi. J’enseigne depuis…longtemps. Je n’ai jamais vu ça. Il aurait fallu qu’il te tue pour que tu renonces.
-Non.
-Quoi non ?
-Me tuer n’aurait pas suffi. »

« Je lui ai sauvé la vie, il a volé la mienne. Il a ouvert pour moi des portes cachées, des portes verrouillées, des portes inaccessibles. Il a dévoilé des horizons lumineux et des possibles exaltants. Il m’a guérie de blessures que j’ignorais porter et, pour finir, m’en a infligé de nouvelles que je suis incapable de supporter. »

« Sur une avenue déserte, ma Z1000 fonce à une allure totalement répréhensible. Son phare troue la nuit et les immeubles autour de nous défilent, de plus en plus vite. Jasper a passé ses bras autour de ma taille et fait corps avec moi. Je sais qu’il a fermé les yeux et savoure l’instant.
Comme moi.
Confiant.
Comme moi.
La vie mérite d’être vécue.
Toujours. »
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Ce roman fait partie du challenge :

New Pal 2015 : 12/75

samedi 17 octobre 2015

Je ne sais plus pourquoi je t’aime, de Gabrielle Zevin

[Albin Michel, 2009]

Gabrielle Zevin est un auteur dont j’ai entendu parler à plusieurs reprise, notamment pour son dyptique « La mafia du chocolat ». Ses livres m’ont toujours intriguée, et le challenge ABC m’a incitée à en lire un, afin de compléter la lettre Z.

Résumé

Suite à une chute dans les escaliers de son lycée, Naomi perd la mémoire des quatre dernières années. Elle a la mémoire de ses douze ans, ignore tout du divorce de ses parents, de la naissance de sa demi-sœur, et ne reconnaît plus ses amis ou son petit ami. Lorsqu’elle retourne au lycée, elle n’arrive plus à être celle que les autres attendent. Doit-elle s’affranchir de son passé pour avancer ? Peut-elle se réinventer complètement ?

Un thème assez courant

L’amnésie est un thème finalement assez courant dans les romans ado ou adultes, et je le trouve plutôt intéressant, puisqu’il prive les personnages de passé, de repères, et les force à se réinventer. Celui-ci ne révolutionne pas le genre, mais il est plutôt bien mené, explorant les relations familiales, amicales et sentimentales de Naomi. C’est peut-être dans ce dernier domaine que le bât blesse, avec un inévitable triangle – que dis-je, un carré ! – amoureux. Ainsi, le roman est agréable mais peine à sortir de l’ordinaire.

Les personnages

Naomi est un personnage intéressant de par son évolution. C’est quelqu’un qui se découvre elle-même ou plutôt, qui se redécouvre. Néanmoins elle ne m’a pas toujours été très sympathique. Son amnésie l’amène à se centrer sur elle-même, quitte à être un peu égocentrique. Et sentimentalement parlant, elle manque cruellement de jugeote. En revanche j’ai beaucoup aimé Will, son meilleur ami, avec ses cadeaux originaux, sa manière d’être et de parler. Je n’ai pas trop adhéré aux personnages de James et Ace, chacun trop stéréotypé dans son genre.

L’écriture

Quant à l’écriture, elle est fluide, sans familiarité particulière ni lyrisme. C’est une écriture du quotidien, qui s’efforce de nous restituer les émotions d’une adolescent complètement perdue.

En quelques mots…

Ainsi, ce roman est plutôt agréable à la lecture mais manque d’originalité. J’ai aimé suivre l’évolution de ce personnage en reconstruction, mais Naomi ne m’a pas été très sympathique pour autant. C’est au final un roman assez ordinaire, pour adolescentes à partir de 13/14 ans, sans doute pas le meilleur titre de l’auteure.

Note : 3/5
Stellabloggeuse
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« Avant tout, mon histoire est une histoire d’amour. Et comme la plupart des histoires d’amour, celle-ci met en jeu le hasard, la gravité et un coup sur la tête. Tout a commencé par une pièce lancée en l’air. La pièce est retombée côté pile. J’avais choisi face. Si les choses s’étaient passées comme je le voulais, il n’y aurait peut-être pas d’histoire. Juste un chapitre ou une phrase dans un livre dont le sujet général ne serait pas encore décidé. Peut-être ce chapitre aurait-il contenu le plus léger des murmures d’amour, mais peut-être pas. Parfois, on est obligé de perdre. »

« On oublie qui était branché et qui ne l’était pas, qui était beau, intelligent, sportif ou pas. Qui est allé dans une bonne fac. Qui donnait les meilleures fêtes. Qui pouvait vous trouver de l’herbe. On les oublie tous. Même ceux qu’on disait aimer, et même ceux qu’on aimait vraiment. Ceux-là sont les derniers à disparaître. Et ensuite, une fois qu’on a suffisamment oublié, on aime quelqu’un d’autre. »

« J’étais heureuse pour papa, mais j’avais aussi la sensation d’être en train de le perdre. J’étais de nouveau le bébé dans l’étui de machine à écrire. Peut-être était-ce la vie, tout simplement ? Redevenir sans cesse orphelin. »
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Ce roman fait partie du challenge :

Challenge ABC 2015 : 26/26

samedi 10 octobre 2015

Dysfonctionnelle, d’Axl Cendres : une famille haute en couleurs

[Sarbacane, 2015]

Mon avis enthousiaste sur « Mes idées folles » d'Axl Cendres fut l’un des premiers publiés sur ce blog, à son ouverture. J’étais tombée sous le charme de cette histoire pleine d’imagination et de fraîcheur. J’ai un peu moins apprécié « La drôle de vie de Bibow Bradley » dont le potentiel énorme m’a semblé sous exploité. Mais j’étais ravie et curieuse de découvrir son dernier roman en date, « Dysfonctionnelle », paru le 7 octobre.

Résumé

Fidèle est née au mauvais endroit au mauvais moment, au cœur d’une famille dysfonctionnelle. Elle grandit dans un bar, entre trois sœurs et trois frères, une mère perturbée, un père passant régulièrement par la case prison, un oncle versé dans la « sychologie » et une grand-mère bienveillante. Son QI la mène pourtant dans un lycée des beaux quartiers, où elle vivra un véritable choc des cultures. Elle est pourtant la preuve que « Même avec une chose que tout le monde croit perdue, on peut faire quelque chose de merveilleux ».

Une famille merveilleusement atypique

C’est avant tout un roman sur la famille. A une époque où certains voudraient nous vendre, nous imposer un modèle de famille (un papa une maman, patati patata), Axl Cendres nous offre l’exemple parfait  modèle familial complètement original, en dehors de tout règle. Elle nous prouve par là qu’il n’y a pas de recette pour rendre les enfants heureux et en faire des adultes. Le lecteur vit donc au rythme de cette famille complètement loufoque, en suivant la trajectoire de Fidèle, avec ses hauts et ses bas. Malgré quelques facilités par moments, on s’attache énormément, mais surtout, c’est un roman où l’on sent de la vie.

Un roman très riche

Au travers d’une belle histoire d’amour, on aborde également le thème de l’homosexualité et l’homoparentalité. De nombreux autres thèmes sont présents, comme la religion évoquée sur un ton gentiment dérisoire, cette famille mêlant judaïsme, catholicisme et islam. Ou la maladie mentale de la mère de Fidèle, prétexte à quelques réflexions sur l’absurdité des guerres. Ou le militantisme, la musique classique, le foot… Et au milieu de tout cela, Axl Cendres arrive encore à glisser de jolies références à ses autres romans, ou même à d’autres romans exprim’ (notamment Comme des images de Clémentine Beauvais).

Les personnages

Le point fort de ce roman, c’est indubitablement cette galerie de personnages hauts en couleur, cette famille pleine de différence qu’Axl Cendres nous conte avec tant de tendresse que l’on s’y attacha immédiatement. Le destin de Fidèle m’a tenu à cœur. J’ai aussi été touchée par sa maman et sa maladie, mais surtout par Zaza, la grand-mère, avec son accent algérien, son couscous à partager et son islam de tolérance. Enfin, mention spéciale pour l’intelligence de l’oncle, qui permet à cette famille de fonctionner envers et contre tout.

L’écriture

Concernant l’écriture, l’auteure adopte un style plutôt oral, l’histoire nous étant directement contée par Fidèle. Le langage est donc gentiment familier. Le rythme est vif et les personnages s’expriment avec leurs accents, ajoutant à la sensation de vie qu’apporte le roman.

En quelques mots…

Ainsi, Axl Cendres nous offre un roman drôle, tendre et parfois émouvant, sur une famille inattendue à laquelle on s’attache sans s’en rendre compte. Malgré quelques facilités, c’est un roman vivant, qui aborde de nombreux thèmes de société. Merci pour cette belle leçon de différence, tout simplement. A découvrir à partir de 15 ans (la présence d’alcool et drogue pouvant heurter les ados plus jeunes, ou leurs parents).
Merci aux éditions Sarbacane pour cette lecture.

Note : 4/5
Stellabloggeuse
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« Ma peur n’a cessé d’augmenter tandis que je constatais, au fil des mois, que JR était exactement comme moi : un pur produit kabyle aux cheveux bruns, yeux bruns, peau claire…il allait être moi, en mieux. Comme on répétait souvent que j’étais un « garçon manqué », je me disais que ce frère, lui, allait être un « garçon réussi » et qu’il allait, pour de bon, m’évincer du cœur de mon père… »

« -Demain, y’a des chances pour que les aut’ gamins se moquent de toi…
-Et pourquoi ça ? j’ai demandé en croisant les bras, pour mimer mon père quand il entendait quelque chose qui lui plaisait pas. Moi qui croyais être la personne la plus cool de l’univers, je voyais pas pourquoi on se moquerait de moi.
Mon oncle n’osait pas me répondre : « Parce que t’es une petite grosse en perfecto qui s’appelle Fifi », alors il a dilué :
-Pace’que t’es di-ffé-rente.
Je restais perplexe, il a continué :
-Ça veut dire que les autres ne sont pas comme toi, mais ils sont simplement plus nombreux. Pigé ? »

mardi 6 octobre 2015

Bluebird, de Tristan Koëgel : le blues du Delta

[Didier Jeunesse, 2015]

Sur le thème de la ségrégation, j’avais beaucoup aimé « Sweet sixteen » d’Annelise Heurtier (non chroniqué), ou « Les faibles et les forts » de Judith Perrignon. C’est un thème fort, que j’aime bien retrouver dans les romans. L’idée de le trouver associé à la musique dans le dernier roman de Tristan Koëgel m’a donc donné envie de le lire.

Résumé

Dans l’Amérique des années 1940, Minnie et son père Curtis sillonnent les routes du delta du Mississipi avec leur guitare, leur harmonica et cette musique blues de laquelle ils vivent en la chantant dans les bals, les pique-niques, les plantations. Lorsque Minnie se tord la cheville, leur destin prend un tour inattendu et se lie à celui des travailleurs d’une plantation. Entre ses rêves de gloire et la quête d’un amour à priori impossible, Minnie va défier les lois qui séparent les hommes blancs des noirs.

Un roman musical

En lisant la quatrième de couverture, je m’attendais à quelque chose de plus romanesque, avec une grande histoire d’amour contrariée. Il n’en est rien, le roman est davantage centré sur la vie de la plantation et sur la musique. Le blues du Delta est en effet omniprésent, davantage que le thème de la ségrégation, qui est finalement peu approfondi, même s’il revient régulièrement. C’est donc avant tout un roman autour de l’ascension d’une chanteuse de blues.

Une intrigue peu crédible

Mais si le fond est intéressant, j’ai trouvé ce roman trop angélique. En voulant faire un pied de nez à la ségrégation, l’auteur multiplie les heureuses coïncidences, jusqu’à en perdre sa crédibilité. Ainsi, ce roman qui aurait pu être puissant émotionnellement parlant est finalement assez creux.

Les personnages

Je ne me suis pas vraiment attachée au personnage de Minnie, obnubilée par la poursuite de son rêve de gloire et assez peu mature. J’ai préféré son père, le songster, ou l’Indien Nashoba, plus attachants. Quant à Elwyn, je n’ai pas vraiment réussi à le cerner, même si nous passons plus chapitres en sa compagnie.

L’écriture

Quant à l’écriture, elle est assez orale. Ainsi, lorsque Minnie s’exprime, le texte est dépourvu de négations, comme si elle racontait-elle-même son histoire au coin du feu. Dans l’ensemble, cela ne m’a pas trop dérangée, il y a suffisamment de détails et de descriptions.

En quelques mots…

Ainsi, j’ai été un peu déçue par ce titre, moins romanesque et moins puissant émotionnellement parlant que je ne l’aurais imaginé, d’autant plus que je ne me suis pas vraiment attachée aux personnages. Il vaut néanmoins le détour pour son aspect musical et pour découvrir le quotidien d’une plantation dans l’Amérique de la ségrégation, avant que l’intrigue ne prenne un tour trop angélique. Pour bons lecteurs à partir de 14 ans.

Note : 3/5
Stellabloggeuse
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« Il était né esclave, Papy, les fers aux pieds. Il avait vu la guerre, aussi, entre les Etats du Nord et ceux du Sud. Et quand elle s’était terminée, il avait cru, comme les autres, que les choses iraient mieux. Mais il s’était retrouvé interdit de toilettes, de trottoirs, de fontaines publiques, de restaurants. Il n’avait plus de chaines aux pieds, mais les maillons de celle qui le liait aux champs étaient encore plus difficiles à supporter. En plus de lui lier les chevilles, ils lui faisaient saigner le cœur. »


« On y est, on y est… mais où ? Par réflexe, j’ai reculé. Tout nous est tombé dessus. Les voitures, les immeubles, la chaleur, tout. Moi qui croyais que le Delta Queen était grand… Bon sang, mais ces immeubles ! On en voyait pas le bout. Qui avait pu construire ça ? On pouvait loger toute la plantation dans un seul de ces bâtiments ! […] Là, on ne pouvait que se rendre compte qu’on était complètement écrasés par la ville. Et le pire, c’est que ça ne choquait que nous. »

samedi 3 octobre 2015

Le noir est ma couleur, tome 4, d’Olivier Gay : L’évasion

[Rageot, 2015]



*Attention, il s’agit du tome 4 d’une série, présence de spoilers sur les tomes précédents*



Souvenez-vous il y a quelques semaines, je me suis sentie redevenir adolescente le temps de lire les trois premiers tomes de la série fantastique « Le noir est ma couleur », par Olivier Gay. Le premier tome était prometteur, le deuxième addictif et le troisième plus nuancé, plus abouti. La fin laissant Alex et Manon en plein suspense, j’avais hâte de découvrir ce tome 4 !



Résumé



Manon et Alexandre sont en fuite, en direction de Nice. Traqués par le conseil des Mages, ils tentent de rejoindre les Mages Noirs basés à Nice, qui sont les seuls capables d’aider Manon à comprendre et contrôler ses pouvoirs. Mais entre les attaques du conseil et les accès de magie noire de Manon, le trajet ne sera pas de tout repos !



Un tome de transition



Par rapport aux trois tomes précédents, celui-ci m’a fait l’effet d’un tome de transition, centré sur la fuite des deux jeunes gens et ses rebondissements. L’intrigue en elle-même n’avance pas beaucoup, sauf à la toute fin avec des révélations encore une fois surprenante et (évidemment) un suspense insoutenable.



Une romance plus étoffée



Mais ce tome est surtout celui du rapprochement entre Manon et Alexandre. Ils sont en fuite, livrés à eux-mêmes, et chacun prend conscience de l’importance de l’autre et de l’attachement qu’il lui porte. Leur relation s’étoffe et gagne en intensité. Néanmoins, tout ne sera pas simple ni rose, car Manon n’est plus tout à fait elle-même, sous l’emprise de la magie noire.



Les personnages



Alexandre reste fidèle à lui-même : plein d’humour même dans les pires moments, et surtout quand il ne faut pas, un peu macho sur les bords, et prêt à transgresser toutes les lois si on le lui demande. Je n’y peux rien, j’adore cette canaille. Quant à Manon, elle continue à s’enfoncer dans la magie et la jeune fille sage est de plus en plus lointaine, même si elle ressurgit de temps à autre. J’attends de voir jusqu’où elle peut aller. Quant aux mages noirs, pour ce que nous en voyons dans ce tome, ils ne sont pas franchement sympathiques, étonnant n’est-ce pas ?



L’écriture



Le style reste le même que dans les tomes précédents : il varie selon que l’on adopte le point de vue d’Alexandre et de Manon, et il est dans l’ensemble plutôt direct et efficace. Pas de la grande littérature, mais cette plume est au service de l’action proposée et donne un rythme vif.



En quelques mots…



Ainsi, du point de vue de l’intrigue, ce tome constitue une transition, Alexandre et Manon étant à la recherche des mages noirs. L’auteur en profite pour approfondir leurs relations et aller plus loin dans la magie noire. Et cette fin donne encore une fois une envie pressante de connaître la suite ! Pour les adolescents à partir de 14 ans.



Note : 4/5

Stellabloggeuse

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« Il me sourit, et je sentis une bouffée de gratitude incroyable envers lui. Une bouffée de tendresse. Une bouffée d’amour. Oui, d’amour. Bon sang, qui d’autre aurait pu me supporter ? Qui m’aurait souri après ce que je lui avais infligé ? Je l’avais endormi, maltraité, saigné, martyrisé. Je l’entraînais dans tous mes ennuis. Je l’obligeais à affronter des Ombres, des Mages, des policiers. Je changeais sans le vouloir de personnalité pendant la nuit. Je l’obligeais à réfréner ses ardeurs. Je risquais de lui dévorer l’âme. Et il restait. »



« J’ai eu tort de stresser ; Manon revient enfin en arborant un sourire radieux. Le soleil souligne sa silhouette d’une lueur mordorée. Ouais, je connais des mots, moi aussi. Elle mordore grave en ce moment. Surtout, elle tient un bidon d’essence dans la main gauche et des sandwichs dans la droite. Je ne pensais pas que je me réjouirais un jour de voir écrit le mot Sodebo. »



« Je n’ai pas le temps de lui dire qu’elle est complètement folle, et qu’est-ce que c’est que cette manière de prétendre que je suis amoureux, et elle se prend pour qui, et de toute façon c’est quoi l’amour, et si ça se trouve je vais me barrer demain et elle l’aura bien cherché, quand elle se glisse dans mes bras pour m’embrasser. Bon, d’accord, je suis peut-être amoureux. »

jeudi 1 octobre 2015

En septembre 2015...

La rentrée est passée, nous avons tous repris un rythme plus ou moins effréné, et c'est maintenant l'heure du bilan de septembre. Et par la même occasion d'une 500e article pour le blog!

Ce mois-ci, j’ai donc lu et/ou chroniqué :

Bien mais sans plus :


C.H.A.R.L.Ex, de Danielle Martinigol (3/5)
Merci, de Zidrou et Monin (3/5, BD non chroniquée) : Une BD originale sur une jeune fille condamnée à des travaux d'intérêt général en mairie, et qui se prend au jeu de l'action politique. Dommage que la fin soit trop rapide et un peu décevante.

J'ai vraiment aimé :

Bran, de Grimaldi et Plenzke (3,5/5, BD non chroniquée) : Une BD très sympathique avec un personnage arrogant qui se retrouve maudit sous la forme d'un corbeau. De l'humour et de beaux dessins pour ce one-shot.
CIEL, tome 2, de Johan Heliot : Le printemps de l'espoir (3,5/5)
Irrésistible fusion, de Simone Elkeles (3,5/5)
Celle qui sentait venir l'orage, d'Yves Grevet (3,5/5)

    Ils m'ont "embarquée" :

Quelqu'un qu'on aime, de Séverine Vidal (4/5)
Blue book, d'Elise Fontenaille (4/5)
Phobos, tome 1, de Victor Dixen (4/5)
Ce qui ne nous tue pas, d'Antoine Dole (4/5)
Chaque soir à onze heure, de Benyamina et Simon (4,5/5, BD non chroniquée) : Un petit coup de cœur pour cette BD adaptée d'un roman de Malika Ferdjoukh : bon scénario, ambiance gothique, beaux dessins... J'ai été emportée!

     

     
    
 

    Ce qui nous fait 8 romans et 3 bandes-dessinées, des lectures variées en genre et en qualité.

 Les chouchous du mois :
   
 


    Les articles les plus consultés par les visiteurs :

La 5e vague, tome 2, de Rick Yancey : La mer infinie (170 vues)
Ce qui ne nous tue pas, d'Antoine Dole (43 vues)
Quelqu'un qu'on aime, de Séverine Vidal (30 vues)
  
Le mois prochain je souhaite lire : 

-Colomb de la lune, de Barjavel
-Je ne sais plus pourquoi je t'aime, de Gabrielle Zevin
-Dysfonctionnelle, d'Axl Cendres
-La Nuit du Titanic, de Walter Lord


  En ce moment je lis :


Du nouveau dans ma bibliothèque :

Dysfonctionnelle, d'Axl Cendres (service de presse)


   Les visites du mois :

1160 pages vues (blogger ne permet pas de dénombrer les visiteurs uniques). 

Je vous souhaite à tous un excellent mois d'octobre. Pour ma part c'est un mois important, nouveau travail en bibliothèque, nouvelle vie dans une autre ville...que du bonheur!

  Stellabloggeuse