[Arléa, décembre 1998]
Me voilà avec un premier roman tout en douceur et en délicatesse, paru il y a maintenant une dizaine d’années. Dans « La petite dernière », Myriam Cohen-Welgryn nous raconte le deuil de deux enfants qui ont perdu leur petite sœur, avec sensibilité, mais sans appitoiment.
Les personnages ne sont pas nommés, mais désignés par leur fonction dans la famille, comme dans le Jeu des Sept Familles : le père, la mère, l’ainé, la cadette, et la petite. La partie commence. Tout d’abord, quelques scènes pendant lesquelles le jeu de carte est au complet, des souvenirs joyeux : un pique-nique, un jeu, des disputes entre frères et sœurs. Puis, l’accident, raconté très simplement, puis revu plusieurs fois à travers les yeux des enfants.
Commence alors une nouvelle partie, avec une carte manquante. Voilà le temps du deuil pour les deux enfants. Tous les deux, ils se sentent coupables : la grande sœur qui avait promis de bien lui tenir la main ; le grand frère qui pense qu’il n’a pas été assez gentil avec la petite et n’en dort plus la nuit.
Pendant longtemps, ils se racontent des histoires, avec une naïveté touchante. Ils guettent leur sœur dans le ciel, ou l’imaginent dans une famille plus gentille. Ils imaginent des rites indiens pour faire passer la douleur de leurs parents. Les autres enfants, eux, leur assènent sans délicatesse cette vérité qu’ils ne sont pas prêts à entendre, en une phrase claire : « ta sœur est morte ».
Ce roman raconte leur deuil, leur cheminement pour enfin admettre que la petite n’existe plus que dans leur cœur, et reprendre le cours de sa vie sans elle. Myriam Cohen-Welgryn le fait avec talent, en nous donnant des yeux d’enfants. On sourit souvent à la lecture, malgré la gravité du sujet. On est ému aussi. Le seul petit bémol que j’ai à soulever consiste en des répétitions, lorsque, à plusieurs reprise, les enfants évoquent la place de leur sœur dans le ciel.
Mais elles sont finalement compréhensibles : les enfants ont besoin d’en parler souvent, de répéter les mêmes choses, car ils ne comprennent pas l’absence de leur sœur. Ils ont besoin de trouver une explication qui leur paraît plausible, et de s’en convaincre. Ainsi, l’auteur montre la difficulté d’expliquer la mort aux enfants, et les malentendus qui peuvent en résulter. En effet, pour accepter la mort de leur sœur et la laisser partir, ils doivent aussi la comprendre.
En résumé, c’est un beau roman qui aborde en finesse un sujet délicat. Un joli moment à passer…
Note : 3,5/5
Stellabloggeuse
-------
« Il faut regarder le ciel à l’infini et le couvrir des yeux. On dit qu’on peut attendre des jours, des mois, des années, tu ne sais jamais à l’avance. Et puis un jour, tu regardes et tu comprends. Elle est là et tu la reconnais. Tu la distingues entre toutes les étoiles à sa couleur, à sa forme, à son éclat. Elle te fait signe et c’est indiscutable. Quand elle aura terminé son voyage et se sera transformée en lumière, la petite, elle projettera nos ombres sur le sol, tu verras. »
Je trouve l'extrait magnifique, et l'ai même relu deux fois. Le sujet parait délicat, diffcile de ne ma tomber dans le mélo, mais je dois dire que tu m'as intriguée. J'espère avoir l'occasion de découvrir ce livre prochainement !
RépondreSupprimerEffectivement, c'est vraiment traité avec légèreté, même si c'est parfois très émouvant, j'ai beaucoup aimé cette lecture.
SupprimerMerci d'être passée par ici :)
Voilà une lecture qui me tente beaucoup. Je sens des larmes en perspective...
RépondreSupprimerJ'ai bien versé ma petite larme... Mais au final, très peu, car ce roman évite le pathos, le thème est traité de manière très délicate
Supprimer