dimanche 30 novembre 2014

Les larmes rouges, de Georgia Caldera, tome 1 : Réminiscences

[J’ai Lu, 2013]

« Les larmes rouges » de Georgia Caldera est un livre qui m’attirait depuis longtemps, grâce aux bonnes appréciations vues sur Livraddict, et au prix Merlin qu’il a reçu en 2012 dans sa première édition (Le chat Noir). L’organisation d’un club de lecture sur le thème de la folie m’a donné l’occasion de le découvrir.

Résumé

Cornélia, âgée de 19 ans, ne trouve plus de raison d’espérer, et décide d’en finir avec la vie, poussée par une voix intérieure. Pourtant, elle survit miraculeusement et démarre une nouvelle vie avec son père, dans le village de Rougemont. Mais la voix ne la lâche pas pour autant, bientôt accompagnée d’hallucinations très réalistes. Cornélia en perd le sommeil et l’appétit. Le revêche occupant du château voisin, celui-là même qui lui a sauvé la vie, détiendrait-il les réponses qui lui manquent ? Ou est-elle simplement en train de devenir folle ?

Un roman très sombre

C’est un roman à l’atmosphère romantique, dans le sens le plus sombre du terme. Les personnages sont torturés et leur trajectoire laisse peu de place à l’espoir. En effet, c’est une histoire très noire, pour lecteurs avertis. Que ceux qui ne supportent pas l’hémoglobine passent leur chemin, car les « hallucinations » de Cornélia sont parfois très violentes, et cela va en s’accentuant à mesure que l’on avance dans la lecture. Le décor participe à l’angoisse ressentie par le lecteur, avec un château et une chapelle en ruines, tout en donnant à l’histoire un charme « à l’ancienne ».

L’un des grands thèmes du fantastique (je ne dirai pas lequel pour vous laisser la surprise) est revisité une nouvelle fois, et avec intelligence. En revanche, j’ai trouvé peu crédible le fait que Cornélia arrive à conserver assez longtemps un semblant de vie « normale » dans le village, ce pan de l’histoire est plutôt mal géré.

Une romance intense

J’ai apprécié la romance que nous propose l’auteure, qui a le mérite d’être très intense. Les sentiments sont puissants, et pourtant cette histoire d’amour n’a rien d’évident, pour plusieurs raisons liées au passé et au présent des personnages. En revanche, au bout d’un moment, c’est tout de même un brin répétitif. Mais la midinette qui sommeille toujours en moi (si vous me lisez régulièrement, vous le savez !) a apprécié cette dimension, qui allège un peu le côté glauque de l’histoire.

Les personnages

En revanche, je n’ai pas beaucoup aimé Cornélia, et particulièrement dans les passages se déroulant dans le passé, où ses idées sur le bien et le mal sont très arrêtées. Je l’ai trouvée davantage sympathique dans le présent, plus nuancée. Elle reste néanmoins assez égocentrique et instable, même si ce dernier point peut se comprendre vu le contexte. En revanche, le châtelain, Henri, m’a vraiment beaucoup plu. C’est un gentleman sous ses airs bourrus, mais il n’en reste pas moins dangereux et assume sa nature. Son personnage est bien dosé, pas trop torturé, pas trop angélique.

L’écriture

En ce qui concerne le style, il m’a plutôt convaincue. La plume a un petit côté « ancien », sans être non plus désuet, qui correspond bien à l’ambiance du roman. Les descriptions sont riches et permettent au lecteur de visualiser l’action, y compris dans les scènes violentes/gores.

En quelques mots…

Ainsi, dans l’ensemble, j’ai aimé ce roman sombre et sanglant, notamment parce qu’il est adouci par une romance assez intense qui a su convaincre la midinette en moi. L’un des grands thèmes du fantastique est revisité d’une manière qui m’a plu. En revanche, d’autres pans de l’histoire m’ont moins convaincue, et le côté sanglant a commencé à me lasser en fin de lecture. Je pense tout de même lire la suite un jour ou l’autre, puisqu’il s’agit du premier tome d’une trilogie. A réserver à un public averti qui aime apprécie les romans sombres (pas avant 16/17 ans pour les adolescents).

Note : 3,5/5
Stellabloggeuse
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« C’est une souffrance terrible, insidieuse, une souffrance de chaque instant, que de sentir renaître au fond de ce vieux corps dépourvu de vie qu’est le mien, les cendres de ces maudits sentiments ; que de sentir repartir au creux de ma poitrine ce feu dévastateur et dément que je croyais à jamais éteint. »


« C’est alors qu’ils se mirent à glisser sur le sol, comme si le parquet s’était subitement transformé en patinoire, tournoyant au rythme de la mélodie. Celle-ci se fit alors plus rapide et sonore, s’adaptant au fur et à mesure à la cadence de cette danse extraordinaire. Cornélia, quelque peu effrayée par la vitesse à laquelle ils virevoltaient, ferma d’abord les yeux, n’osant plus faire le moindre mouvement, subissant sans comprendre les divagations pour le moins étranges de son ami. Puis, l’envie de profiter de cet instant magique prenant malgré tout le pas sur ses appréhensions, elle finit par les rouvrir et fut stupéfaite de découvrir qu’ils avaient finalement quitté le plancher pour maintenant flotter dans les airs, tout près du plafond de la chambre, à hauteur des lustres. »
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Ce roman fait partie du challenge :


Big Challenge 2014 : 9/5

samedi 22 novembre 2014

A comme association, tome 2, de Pierre Bottero : Les limites obscures de la magie


Après avoir lu il y a peu le premier tome de « A comme association », écrit par Erik L’Homme, j’avais très envie de découvrir le second et le personnage créé par Pierre Bottero. Quelques jours après l’anniversaire de sa mort, le moment me paraissait bien choisi pour passer un moment en compagnie de sa plume.

Résumé

Tout comme Jasper, Ombe, 18 ans, fait partie des agents stagiaires de l’Association, qui régule les rapports entre les humains et les Anormaux. Elle se voit confier une première mission, auprès de gobelins qui ont décidé de se réapproprier un lycée situé sur une de leurs terres sacrées. Les complications seront au rendez-vous car, si Ombe n’a peur de rien et peut mettre des baffes à n’importe qui, la magie et la discrétion ne sont pas sa spécialité…

Une série réjouissante

Ce tome est tout aussi réjouissant que celui écrit par Erik L’Homme. Si nous délaissons les blagues pourries de Jasper, on se régale en découvrant Ombe, dotée d’un sacré caractère et d’une bonne dose de poisse ! Ainsi, avec cette série, nous sommes définitivement dans un fantastique qui ne se prend pas au sérieux, volontairement décalé, et ce parti pris me plaît.

Une intrigue vive mais rapide

En ce qui concerne l’intrigue, nous avons une alternance entre les souvenirs d’Ombe, qui nous raconte les grandes lignes de son passé, et de ses missions actuelles et de leur complications. Le rythme est vif, le lecteur n’a pas le temps de s’ennuyer. Comme le précédent, ce tome est un peu rapide, servant surtout à faire connaissance avec le personnage et son univers. J’attends désormais des tomes suivants qu’ils entrent dans le vif du sujet.

Les personnages

Comme avec Jasper, je me suis facilement attachée à Ombe, malgré ses petits travers, ou justement grâce à eux. C’est une fonceuse qui n’a pas peur de se prendre des coups, de toute façon, elle est « presque incassable » selon ses propres termes. Elle possède la même tendance que Jasper à s’attirer des ennuis. Elle a du mal à se lier avec les gens, qui l’exaspèrent vite, et elle doit tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de prononcer des paroles trop dures. Enfin, Pierre Bottero a donné à son personnage son amour de la moto et de sa sensation de liberté, celui-là même qui lui a coûté la vie quelques mois plus tard…

L’écriture

Avec ce roman, Pierre Bottero délaisse son « style fantasy » empreint de poésie pour une plume plus vive, plus énergique et ancrée dans la réalité. Ombe n’est pas du genre poétique, et ce style direct lui correspond très bien. Il y a également, comme toujours, une bonne dose d’humour. Je me suis régalée de certaines formulations, tournures de phrases, et quand on sait que l’auteur n’a pas eu le temps de reprendre et de peaufiner ce tome, cela n’en est que plus louable.

En quelques mots…

Ainsi, j’ai retrouvé avec grand plaisir la plume de Pierre Bottero, dans un genre différent. Le personnage qu’il a créé, fonceur et râleur, m’a bien plu. Après ces deux tomes qui posent les bases du caractère des personnages et de l’univers, j’attends maintenant de voir ce que la suite de l’intrigue nous réserve.

Note : 3,5/5
Stellabloggeuse
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« Je ne suis pas sûre qu’il ait compris mais il hoche la tête pour marquer son assentiment. Compte tenu de sa situation et de mon état d’esprit, c’est la meilleure chose à faire. Sauf que ses copains, sans doute émus par sa détresse, décident d’intervenir. Ils sont trois, que diable, et je ne suis qu’une fille. Oui, mais il me reste une main libre. Tant pis pour eux. »

« Instable et potentiellement dangereuse. Un descriptif partiel et partial de ma personne qui m’a accompagnée durant mon enfance puis ma jeunesse sans pour autant les rendre malheureuses. Et vous savez pourquoi ? Parce que je m’en fiche de ce qu’on pense de moi. Je m’en fiche complètement. Mieux que ça, l’idée que l’on me considère comme potentiellement dangereuse a tendance à me réjouir. »


« Walter est vieux, gras et chauve, c’est un maniaque de la discrétion, il adore taper du poing sur la table mais il aime ses agents. Surtout les plus jeunes. Et il sait qu’on sait qu’il nous aime. Et comme nous on sait qu’il sait, même quand il est en mortel pétard, il y a de l’affection qui traîne dans les coins. »

mardi 18 novembre 2014

Lucides, de Ron Bass et Adrienne Stoltz : un roman original autour de la folie


A l’occasion d’une réunion de notre club de lecture de bloggueuses lyonnaises autour du thème de la folie, j’ai choisi de découvrir un roman à deux voix et au résumé prometteur : Lucides, de Ron Bass et Adrienne Stoltz.

Résumé

Maggie est une jeune new- yorkaise, apprentie actrice, qui a arrêté ses études afin de parcourir les castings. Sloane vit dans une petite ville du Connecticut, entourée d’une famille et d’amis aimants, mais elle est malgré tout engluée depuis un an dans une forme de dépression. Toutes deux auront bientôt 17 ans et, chaque nuit, chacune rêve de la journée vécue par l’autre. Laquelle est réelle ? Laquelle n’est que le rêve de l’autre ? Toutes deux ont peur de rompre l’équilibre et de le découvrir.

Un roman original autour de la folie

Dans l’ensemble, j’ai apprécié cette lecture, même si j’ai quelques bémols à formuler, comme vous le verrez plus tard. Il m’a semblé que cette manière d’aborder la folie, à travers deux jeunes filles qui vivent des vies parallèles, est assez intéressante et originale. On change de point de vue à chaque chapitre, alternant les journées des deux personnages principaux. Après une première partie accrocheuse où l’on découvre les existences des deux personnages, j’ai ressenti quelques longueurs au milieu du roman, avant que mon intérêt ne soit relancé dans le dernier tiers. Quant à la fin, elle m’a plu. L'ensemble est bien mené, ce qui n'a rien de surprenant quant on sait que les auteurs sont tous deux scénaristes.

Des romances trop présentes

En revanche, il est dommage que les romances des deux filles prennent tant de place dans le roman, avec les inévitables triangles amoureux (deux pour le prix d’un !). Contrairement à d’autres romans du genre, ceux-ci n’ont pas vraiment su m’intéresser, c’est ce qui créé les longueurs du milieu du roman. J’ai davantage apprécié lorsque les personnages basculent dans la folie, d’autant plus que, même si mon idée sur l’identité de la « vraie » jeune fille était la bonne, les auteurs parviennent à semer le doute jusqu’au bout.

Les personnages

Les deux jeunes filles ont plusieurs points communs tout en étant différentes. Maggie est plus sûre d’elle, plus fonceuse, mais sa vie est assez solitaire. Sloane est travailleuse, peu consciente de ses atouts, mais elle est très bien entourée. En revanche, toutes deux ont un côté lunatique, une propension à changer plusieurs fois d’avis dans le même chapitre qui m’a parfois exaspérée. Toutes deux ont perdu un être cher un an auparavant, et ont du mal à vivre une histoire d’amour sereine. Même si j’ai apprécié l’originalité de la vie d’actrice de Maggie, j’ai eu une préférence pour Sloane, dont les failles sont plus visibles. Enfin j’ai beaucoup aimé Jade et Max, leurs petits frères et sœurs, pleins d’énergie et d’amour.

L’écriture

Quant à la plume, elle est assez ordinaire, plutôt typique des romans destinés aux adolescents et aux jeunes adultes. Je n’ai pas réussi à déterminer si les deux auteurs avaient écrit ensemble ou avaient alterné les chapitres, le style est homogène. Il y a en tout cas l’essentiel pour se figurer la psychologie des deux jeunes filles ainsi que leur cadre de vie, et les dialogues sont crédibles, naturels.

En quelques mots…

Ainsi, les deux auteurs nous proposent un roman assez original autour du thème de la folie. Il est dommage que la romance et les triangles amoureux prennent tant de place. Les deux personnages se complètent bien, même si leurs sautes d’humeur m’ont parfois exaspérée. J’ai particulièrement apprécié le dernier tiers, où l’on bascule dans la folie.

Note : 3,5/5
Stellabloggeuse
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Ce roman fait partie du challenge :


Challenge 100% R : 18e lecture
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« La chambre noire, mon éternel refuge. J’aime sa tranquille obscurité. Et le fait que la porte fermée, la lumière rouge allumée, personne n’osera entrer, de crainte de voiler les négatifs et autres surfaces sensibles. Auxquelles je m’identifie. »

« Je serai honnête aussi sur un autre point. Je voudrais apprendre à mieux vous connaître, reprend-il, et mon cœur fait un bond dans ma poitrine. Il y a neuf ans de différence entre nous, et si ça ne vous effraie pas, je vous assure que moi, ça me terrifie. Mais je détesterais jouer au petit jeu qui consiste à faire comme si je n’étais pas vraiment intéressé. »


« C’est lui qui m’a appris à inventer des histoires sur les passants. Il gagnait sa vie en écrivant des histoires, et ils disaient toujours qu’elles étaient un moyen de se dissimuler tout en révélant les autres, mais qu’en réalité on ne faisait que se révéler soi-même. »

samedi 15 novembre 2014

Bird Box, de Josh Malerman : un thriller psychologique réussi


Ceux qui la connaissent savent combien la bloggueuse Plume de Cajou est persuasive lorsqu’elle adore un livre. Aussi, il ne m’a pas fallu longtemps après son coup de cœur pour « Bird Box » de Josh Malerman, avant de tenter ma chance à mon tour, avec ce thriller au résumé glaçant.

Résumé

En quatre ans d’existence, ses enfants n’ont jamais vu le ciel. Ils vivent yeux fermés, couverts de bandeaux, entraînés à décrypter le moindre son. Mais aujourd’hui, Malorie est bien décidée à les emmener dehors tous les deux, pour remonter la rivière et accéder à un refuge plus sûr. Pendant cette périlleuse entreprise, elle se rappelle comment sa vie a basculé près de 5 ans auparavant, lorsque les gens ont commencé à être frappés de folie après avoir simplement « vu » quelque chose au dehors…

Un thriller angoissant et bien mené

J’ai trouvé que ce roman était un très bon thriller psychologique, toujours dans la suggestion et dans l’angoisse, très peu dans la description visuelle (et pour cause, les personnages s’efforcent de vivre les yeux fermés). On évite ainsi tout le côté « gore » du thriller, et la privation du sens de la vue induit une tension, créé une atmosphère particulière. Après avoir mis un peu de temps à entrer dans l’histoire, cela a fonctionné avec moi, j’ai eu l’impression de « lire un film d’horreur ». J’étais toujours aux aguets, en attente d’un drame.

J’ai également trouvé le mode de narration très intelligent, mettant en parallèle deux époques de la vie de Malorie et les faisant peu à peu se rejoindre. La seule scène à laquelle je n’ai pas adhéré, c’est celle de l’accouchement (seule scène gore, d'ailleurs, on aurait pu s'en passer), too much et peu crédible à mon goût.

Une dimension psychologique

L’autre aspect intéressant du roman, c’est la qualité de mère du personnage principal Malorie. En effet, elle se découvre enceinte au début de cette « crise de folie » et accouche dans un univers post-apocalyptique. Son personnage met en relief la difficulté d’être mère quand le danger rôde partout. Elle est obligée de les élever durement, pour qu’ils lui obéissent parfaitement, mais elle s’en veut, s’imagine être une mauvaise mère. Elle se pose constamment des questions. Comment protéger ses enfants ? Quelle vie leur offrir ? A quoi bon ?

Les personnages

Malorie est un personnage très intéressant. C’est une survivante, dotée d’une grande force mentale. Elle va de l’avant malgré la perte et les chagrins. Outre la culpabilité évoquée plus haut, elle est obnubilée par la sécurité de ses enfants, elle ne pense à rien d’autre, à tel point qu’elle n’a même pas pris le temps de leur donner un prénom, préoccupation trop futile ! Quant à ses enfants, ils sont disciplinés et très intelligents, ils sont très calmes, mais on sent qu’ils aiment leur mère. Nous passons aussi quelques temps avec les compagnons d’infortune de Malorie : leur chef Tom, doux mais ferme, Jules et son chien, Félix, le sceptique Don, le douteux Gary, et les dames de la maison, Cheryl et Olympia.

L’écriture

Quant à la plume, elle est adaptée au thriller, assez efficace. La narration au présent accentue l’angoisse, on a la sensation de faire partie de la scène. L’angoisse et l’introspection des personnages sont bien dosées, il n’y a rien à redire.

En quelques mots…

Ainsi, ce thriller psychologique m’aura bien fait flippé ! Il est bien mené, et l’absence du sens de la vue induit une angoisse toute particulière, oppressante. Ajoutons à cela un bon personnage de mère, tout entière focalisée sur la survie de ses enfants, et vous obtenez un bon roman, qui ravira les amateurs de frisson qui n'aiment pas le sang. Quand je lis que les droits ont été acheté par le cinéma, j’en frissonne d’avance !

Note : 3,5/5
Stellabloggeuse
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« Tu es une mauvaise mère. Incapable de leur faire connaître l’immensité du ciel. Incapable de trouver un moyen de les laisser sortir s’amuser librement dans la cour, la rue, le voisinage. Ou de leur accorder un unique coup d’œil furtif, juste une fois, à l’extérieur, quand les cieux s’assombrissent et se constellent soudain merveilleusement d’étoiles. Tu leur as sauvé la vie pour leur donner une existence dénuée de sens. »


« Il attend. Et plus les secondes passent, plus la frayeur s’empare de lui. Comme si le silence se faisait de plus en plus assourdissant. Comme s’il était sur le point d’entendre quelque chose qu’il ne veut pas entendre. Mais aucun son ne lui parvient, aussi s’efforce-t-il de se convaincre qu’il a tout imaginé. Peut-être y avait-il quelque chose dans le puits, bien sûr, mais ça aurait aussi bien pu se trouver dans la rivière. Ou dans les bois. Ou dans l’herbe.»

mardi 11 novembre 2014

Mangez-le si vous voulez, de Jean Teulé : chronique d’une hystérie collective

[Julliard, 2009]

Il y a une quinzaine de jours, j’ai passé un très bon moment avec « Le magasin des suicides » de Jean Teulé. J’ai donc décidé d’enchaîné avec « Mangez-le si vous voulez » du même auteur, dans l’idée d’aller peut-être voir l’adaptation théâtrale de ce dernier, qui passera non loin de chez moi en janvier.

Résumé

Dans ce roman, Jean Teulé reconstitue un fait divers d’une rare violence qui a eu lieu le 16 août 1870 dans un village jusque-là paisible. Lorsque Alain de Monéys, notable du village voisin, se rend à la Foire de Hautefaye, il ne se doute pas qu’il n’en reviendra pas vivant. Il s’imagine encore moins qu’il sera lynché, torturé et même dévoré. Et pourtant, c’est bien ce qui arrive…

Du désespoir à la violence collective

C’est un roman assez hallucinant que nous propose ici Jean Teulé, le récit d’une hystérie et d’une violence collective, remède  terrible d’un profond désespoir. En effet, les villageois viennent d’apprendre que la défaite de la France contre la Prusse est imminente. Cette mauvaise nouvelle fait suite à un été désastreux marqué par la sécheresse et des récoltes minimes. C’est alors qu’un simple quiproquo met le feu aux poudres et Alain Monéys se trouve accusé d’être de mèche avec les prussiens.

Teulé nous montre ainsi comment de paisibles villageois peuvent devenir, si l'on combine les bons facteurs, des brutes sanguinaires dénuées de raison. Les défenseurs d’Alain sont trop peu nombreux pour contenir tous les autres désireux d’agir, de faire un geste pour « sauver » l’Empire français. S’ensuivent des scènes terrible de torture jusqu’au bûcher final, puis le procès qui suivra. Ames sensibles s’abstenir, mais c’est vraiment bien mené !

Les personnages

Ce qui ajoute à la tension et au drame du roman, c’est que le personnage d’Alain de Monéys est bien sous tous rapports. C’est un bon citoyen, adjoint au maire de son village, qui s’efforce d’aider son prochain dans la mesure de ses moyens. Courageux, il a refusé d’être réformé et s’apprête à rejoindre le front. Quant aux villageois, ils offrent un tableau dément, de ceux qui réclament que le sang coulent aux couards qui refusent de voir ce que se déroule sous leurs yeux, en passant par les enfants pour lesquels cette journée marquera un passage vers l’âge adulte.

L’écriture

Dans ce roman, la plume de Teulé se fait plus simple, plus directe. Il va davantage à l’essentiel, sans pour autant négliger le décor. Il n’épargne pas à son lecteur les détails sanglants (comment le pourrait-il ?), mais pour moi c’est bien dosé, ni trop policé ni franchement gore.

En quelques mots…

Ainsi, une fois de plus avec Teulé, ce roman est un Ovni ! Il s’empare d’un fait divers et montre le pire de la nature humaine. Il décortique la manière dont de paisibles villageois sans histoire deviennent des brutes sanguinaires. Bien mené, mais à réserver aux lecteurs avertis et pas trop sensibles ! (mais si j’ai pu le supporter, cela devrait aller pour vous^^).

Note : 3,5/5
Stellabloggeuse
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« Chacun se bouscule pour le taper, imprimer sa marque sur son corps ennemi. Celui qui vient de frapper se retire, laisse sa place à un autre qui, coup donné, s’efface pour être aussitôt remplacé. Cette gestion instinctive et collective du massacre dilue la responsabilité. Pour les adolescents venus à la foire, ce carnage offre l’heureuse opportunité de prouver leur virilité et de s’intégrer parmi les hommes. »


« Il est conduit hors du village comme par un déluge, comme en triomphe, à travers le pétillement de leurs injures. Les rives des sombres bords se serrent autour de lui, sonores de cris de mort ! Ô le souvenir des frais instants de paix profonde de sa vie plutôt confortable d'avant. Mais, devenu ange hors d'usage, il poursuit, tiré par les chevilles, sa montée vers le foirail. Le meurtre que la foule s'apprête à commettre est un cri d'amour adressé à la France. »

vendredi 7 novembre 2014

E-Den, tome 1, d’Elodie Tirel : Les Survivants


Me voilà aujourd’hui avec le premier tome de « E-Den » d’Elodie Tirel, une auteure qui s’est déjà fait remarquer dans le milieu de l’Imaginaire. Par ailleurs, ce roman fait partie de la sélection du Prix Pierre Bottero, qui sera remis lors des Oniriques de Meyzieu (69) en mars prochain.

Résumé

Suite à une série de catastrophes qui ont décimé l’humanité, les survivants ont trouvé refuge sous terre et ont fondé Renaissance. Pourtant, cette société qui perdure depuis des décennies n’a rien d’idyllique. Les habitants du Cocon ont le pouvoir et le confort, mais ne sont pas libres de leur destinée. Ceux du Grenier fournissent aux autres toutes les matières premières, tandis que dans la Cave, les habitants vivent dans la misère et effectuent les travaux difficiles, surveillés par la milice. Dans le Cocon, E-Den, rêve de devenir médecin, tandis que dans la Cave, Siméon a échappé à ses parents adoptifs et vit de menus larcins. Leurs vies à tous deux vont voler en éclats et les pousser à la fuite.

Un univers SF riche et cohérent

J’ai rapidement succombé à ce très bon roman ! J’ai d’abord été séduite par cet univers de science-fiction. Si l’idée de base est classique, une société survivant suite à des catastrophes, j’ai apprécié l’originalité de ce monde souterrain avec ses gaines d’aération, sa milice, ses créatures étranges, ses caïds, ses caméras, son cloisonnement. J’ai également adhéré à la surface, l’extérieur, que nous découvrons dans la seconde partie du roman, avec une civilisation proche de l’Amérique précolombienne. Le tout est bien développé et cohérent, même si j’attends davantage d’explications dans les tomes suivants concernant les catastrophes qui ont eu lieu et les « hommes en noir ».

Une intrigue maîtrisée

L’intrigue est également maîtrisée et bien menée, je ne me suis pas ennuyée. Après une phase de découverte de l’univers et des protagonistes, les événements s’enchaînent bien. L’alternance de point de vue entre divers personnages créé un petit suspense et une attente. Enfin, et il faut le noter car cela devient rare, l’auteure nous offre une vraie fin pour ce tome et ne nous laisse pas sur un terrible cliffhanger. Merci !

Les personnages

Les personnages, très attachants, sont l’un des points forts de ce roman. E-Den (pour Elisabeth-Dénétia) est une jeune fille courageuse pour qui secourir autrui est une vocation. Elle a de la volonté, mais reste une adolescente, ce n’est pas une super-héroïne, et j’ai aimé cela. Quant à Siméon, il est encore presque un enfant, mais il se débrouille tout seul. Il a un côté « ours », solitaire, il craint de s’attacher aux autres mais s’ouvre peu à peu. Mais j’ai surtout eu un coup de cœur pour Snoop, le plus loyal des amis, un racureuil (oui vous avez bien lu) qui parvient à merveille à exprimer ses émotions. J’ai également apprécié le personnage de Kate, la « méchante » de l’histoire, je suis curieuse de son évolution.

L’écriture

La plume d’Elodie Tirel est très agréable, fluide, directe mais assez riche. Les descriptions sont réussies, elles donnent vie à l’univers créé par l’auteure. Il y a également beaucoup de spontanéité, d’humour et de tendresse dans les rapports entre les personnages.

En quelques mots…

Ainsi, j’ai eu beaucoup de plaisir à découvrir cet univers avec ce roman porté par des personnages très attachants. L’intrigue est bien menée et m’a intéressée tout du long, et je suis très avide de connaître la suite, même si l’auteure offre une vraie fin à ce tome. A conseiller aux ados dès 13/14 ans et à tous les amateurs d’Imaginaire !

Note : 4,5/5
Stellabloggeuse
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« Seuls les élus savent. Ils contrôlent nos vies d’une main de fer. Depuis l’exode, ils dirigent, commandent, filtrent, matent et sévissent sans pitié dès que le besoin d’en fait sentir. Nous ne sommes que de la main d’œuvre corvéable à merci dont l’élite dispose à loisir pour profiter d’une existence oisive dans le Cocon. »


« Le cœur gorgé d’espoir, les deux jeunes, main dans la main, restèrent un moment à contempler le firmament piqueté de lucioles argentées, sous le regard clément de la lune pleine et ronde. Là, tous les trois, ils se sentaient bien, détendus et sereins. Un univers plein de promesses s’ouvraient à eux, un avenir qui leur offrirait son lot d’imprévus, de dangers, peut-être, mais aussi de rires et de petits bonheurs. Tout semblait permis, même l’espoir fou de retrouver James. »

mardi 4 novembre 2014

Boys out ! de Rawia Arroum : un roman frais et addictif


« Boys out ! » de Rawia Arroum est le second roman de cette jeune auteure (déjà publiée chez Persée), qui s’est fait remarquer lors des « Tremplins » organisés par Blackmoon afin de faire émerger de jeunes talents français. Je dois dire que le résumé de cette histoire féministe m’a tout de suite attirée !

Résumé

Lyra vit dans un monde dominé par les femmes, où les hommes sont proscrits. Ceux qui ont échappé à l’Eradication sont traqués impitoyablement et permettent aux femmes de procréer. Lyra, à l’aube de ses 18 ans, va devoir à son tour remplir son devoir de citoyenne et s’accoupler à un homme pour donner naissance à une fille. Mais rien ne va se passer comme prévu… Et si les hommes étaient nécessaires ?

Une dystopie addictive et rafraîchissante

Ce roman a été pour moi une excellente surprise ! Découpé en courts chapitres, il a un côté très addictif, on a toujours envie d’en lire un de plus. Nous découvrons d’abord le quotidien de Lyra. L’univers (dystopique) créé ici est plutôt cohérent, doté d’une histoire et de règles, dirigé d’une main de fer par les sœurs Diva. Et je dois dire que l’idée de base d’une société dominée par les femmes m’a beaucoup plu, ce n’est pas si courant dans les romans et la féministe qui dort en chacune de nous appréciera le geste. Puis, le rythme s’accélère, et le roman devient palpitant ! Enfin, dans le dernier tiers on croit voir venir le bout du tunnel, mais tout sera remis en cause par une fin très surprenante. Elle peut appeler une suite et l’auteure semble y réfléchir, mais elle m’a bien plu telle quelle, laissant la place à l’imagination et remettant en cause tout ce qu’on a cru savoir au cours de notre lecture.

Une romance et un message

Le roman a un petit côté prévisible en ce qui concerne la romance, et cette dernière est un brin dégoulinante par moments. Il y a aussi quelques facilités dans l’intrigue, dans la manière dont les hommes parviennent à résister. Néanmoins, ce n’est pas ce que j’en retiendrai, j’en garderai plutôt le message sur la complémentarité des hommes et des femmes essentiels l’un à l’autre malgré leurs différences et leurs incompréhensions. Ainsi, s’il y a parfois dans ce roman les approximations ou les improbabilités d’un tout jeune auteur, elle en a aussi la fraîcheur et l’audace, et il y a de vraies bonnes idées.

Les personnages

Lyra est un bon personnage de dystopie, on ressent bien l’endoctrinement qu’elle a subi depuis sa naissance. Au début du roman, elle est littéralement terrifiée par la proximité des hommes, et elle les hait profondément. Elle veut les voir mourir. Ce n’est que progressivement qu’elle va entrevoir la complémentarité des hommes et des femmes et s'ouvrir à l'amour, même si elle ne cessera jamais de douter. Quant à Loan il est séduisant et doté d’une belle sensibilité, il est difficile de ne pas lui faire confiance, mais en même temps on ne le connaît pas vraiment et on ne parvient pas à savoir ce qu’il a dans le cœur.

L’écriture

Quant au style, je l’ai trouvé agréable. On sent que Rawia Arroum est une passionnée de livres et que ses lectures ont nourri son vocabulaire et son imaginaire. Sa plume est plutôt direct et spontanée, et il y a de la fraîcheur dans les dialogues et les pensées de Lyra.

En quelques mots…

Ainsi, cette dystopie française n’a pas grand-chose à envier à ses grandes sœurs telles que « Delirium ». C’est un roman addictif, avec de vraies idées et un message qui parlera à tous. S’il y a quelques facilités ou improbabilités dans l’intrigue, il y a aussi de la fraîcheur et de l’audace, et la fin pose de vraies questions. Je ne doute pas que ce roman plaira beaucoup aux adolescentes et aux jeunes femmes à qui je le recommande volontiers !
Merci à Babelio et à Masse Critique pour cette découverte.

Note : 4/5
Stellabloggeuse
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« Le courage est un trait de caractère permettant de faire face aux situations les plus critiques. La raison est une faculté de l’esprit qui permet de dissocier le bon du mauvais, le sûr de l’incertain. La sagesse désigne le savoir et la grande vertu de l’être.
Courage, raison, sagesse : telle est la définition vraie de la « Femme » »


« Nous nous murons ensuite dans le silence. Mais j’ai bien conscience du temps qui passe et de ce que ça implique. J’ai conscience aussi de sa tête sur mon épaule. Et je n’ose pas formuler la sensation qui s’empare de moi, même en pensée. Est-ce ça, le pouvoir d’un homme ? Paralyser la femme, la chambouler ? Lui ôter toute raison ? »

samedi 1 novembre 2014

En octobre 2014...

En ce mois d'octobre, mes lectures ont été assez variées, tant au niveaux des genres que du plaisir de lire !

Ce mois-ci, j’ai donc lu et/ou chroniqué :

Déception :

Inventaire après rupture, de Daniel Handler (2,5/5)

Bien mais sans plus :

L'épreuve, tome 1, de James Dashner : Le Labyrinthe (3/5)
Au revoir là-haut, de Pierre Lemaitre (3/5)

J'ai vraiment aimé :

Le magasin des suicides, de Jean Teulé (3,5/5)
Les sentinelles du futur, de Carina Rozenfeld (3,5/5)
A comme association, tome 1, d'Erik L'Homme : La pâle lumière des ténèbres (3,5/5)

    Ils m'ont "embarquée" :

Wild, de Cheryl Strayed (4/5)

Coup de coeur :

Vampire academy, tome 6, de Richelle Mead : Sacrifice ultime (5/5)
La passe-miroir, tome 1, de Christelle Dabos : Les fiancés de l'hiver (5/5)




Cela fait donc 9 romans, qui m'ont fait passer de la randonnée à la magie, de la déception à l'éblouissement. Je suis ra-vie d'avoir découvert cette belle saga qu'est "La passe miroir", et je suis à la fois heureuse et triste d'avoir terminé Vampire Academy... 
  
Les chouchous du mois :

   
      
Les articles les plus consultés par les visiteurs :

-L'épreuve, de James Dashner, tome 1 : Le labyrinthe (25 vues)
-A comme association, tome 1, d'Erik L'Homme : La pâle lumière des ténèbres (22 vues)
-Le magasin des suicides, de Jean Teulé (21 vues)
-Les sentinelles du futur, de Carina Rozenfeld (21 vues)

  Le mois prochain je souhaite lire : 

-Bird box, de Josh Malerman
-A comme association, tome 2, de Pierre Bottero : Les limites obscures de la magie
-L'allée du roi, de Françoise Chandernagor
-Lucides, d'Adrienne Stoltz et Ron Bass

  En ce moment je lis :


Du nouveau dans ma bibliothèque :

-Wild, de Cheryl Strayed (Masse Critique)
-La 5e vague, tome 2, de Rick Yancey : La mer infinie (cadeau)
-Les enfants d'Alexandrie et Les dames de Rome, de Françoise Chandernagor (cadeau)
-A comme association, d'Erik L'Homme et Pierre Bottero (tomes 1 à 5)
-La passe-miroir, tome 1, de Christelle Dabos : Les fiancés de l'hiver (cadeau)
-Boys out ! (Masse Critique)


  
  
 
  

Et PAF ! +11 pour ma Pile A Lire ! A ma décharge, c'est-pas-ma-faute, c'est celle de Babelio, de mon anniversaire, et des bonnes affaires du Bric à Brac (5€ le lot pour les A comme association, je ne pouvais pas les laisser!). En plus, j'en ai déjà lu 3 ce mois-ci et commencé un 4e...!

   Ce mois-ci le blog a reçu :

1529 pages vues (blogger ne permet pas de dénombrer les visiteurs uniques). 
Merci à vous tous qui passez par ici ! Le blog doit encore progresser en référencement, il n'y a pratiquement aucune visite issue de recherches Google, il va falloir que j'y travaille.

Mais en attendant quelques petites nouvelles :

-L'emménagement du blog est maintenant terminé, je n'ai plus que quelques petits détails à paufiner.

-Pour fêter cela, je vous proposerai bientôt un petit concours !

-Enfin, le blog a désormais un compte Twitter, rendez-vous là-bas pour suivre son actualité : https://twitter.com/Stellabloggeuse !

Bon mois de novembre à tous !
  
Stellabloggeuse