mercredi 7 décembre 2011

Adulte à présent, d'Edgar Sekloka : quand meurent l'enfance et les rêves

[Sarbacane, novembre 2011]

Après le coup de coeur des "Déchaînés" quelques semaines auparavant, je vous présente aujourd'hui l'un des derniers nés de la collection eXprim', aux Editions Sarbacane. Edgar Sekloka a publié son premier roman en 2008, dans cette même collection. Nommé "Coffee", le livre avait beaucoup séduit. 

Ce second roman était donc assez attendu, d'autant plus que le résumé est assez séduisant. Au Cameroun, la Cadette est en colère contre l'engagement politique de son père, qui les met tous en danger. Ils font pourtant partie des privilégiés, ils ont une belle maison. Et la Cadette, elle veut vivre, tout simplement. Mais lorsqu'elle perd sa famille, c'est pour sa survie qu'elle lutte. A New-York, le Fils étouffe dans son appartement trop petit, entre ses deux parents qui ne se supportent plus. Le Fils aimerait bien ne plus se préoccuper d'eux, et vivre sa vie. Mais surout, la cadette et le Fils vont être amenés à se rencontrer, à New York.

J'ai l'impression qu'autour de moi, ce roman a beaucoup plu. Et pourtant, j'avoue que j'ai eu du mal à entrer dedans, je n'ai pas vraiment "accroché" à la première partie du livre, celle qui se passe au Cameroun. Je ne me suis pas vraiment attachée à la cadette, et j'ai été quelque peu agacée par l'évocation récurrente (voire répétitive) de son grain de beauté à la main.

En revanche, j'ai beaucoup aimé la vie New-Yorkaise du Fils, dont l'auteur dépeint le quotidien de manière très réaliste, parlante. J'ai particulièrement apprécié les moments durant lesquels il est en cours, peinture joyeusement cynique de ces classes de collège ingérables. Mais surtout, le fils a une personnalité attachante, et on a vraiment envie qu'il s'en sorte. La partie narrant la rencontre des deux personnages est également réussie, j'ai aimé la relation qui se tisse entre eux, et je l'ai trouvée très crédible.

Ce roman est également une belle leçon de survie en milieu hostile. Les deux jeunes gens s'adaptent, plient mais ne rompent pas devant la violence, que ce soit celle de la guerre ou du quotidien. Mieux, ils restent capable d'aimer, de se préoccuper des autres. Enfin, il faut rendre hommage au style de l'auteur, fluide, rythmé, musical. Ce qui n'est pas un hasard, puisque Edgar Sekloka fait aussi de la musique avec son groupe, Milk Coffee and Sugar.

Il en résulte que c'est un bon roman, mais qu'il brille plus par sa construction et sa langue que par l'histoire ou les émotions ressenties par le lecteur. En effet, je me suis surprise à rester un peu "en-dehors" de l'histoire, et à ressentir peu de choses face à des évènements qui auraient du m'émouvoir. Ainsi, en refermant le roman, et même si j'ai apprécié la fin, j'ai eu comme un goût d'inachevé.

Mais je dois reconnaître que globalement, les romans de cette collection sont d'une telle qualité que je commence à devenir plus exigeante (trop ?). De plus, tout est une affaire de goût, et je vous invite à lire des avis plus enthousiastes sur ce roman (chez BatifolireSophie LJ et Strip n' geek), et surtout à vous faire votre propre opinion !
Et pour en savoir plus : un interview de l'auteur, Edgar Sekloka

Note : 3/5
Stellabloggeuse
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« Salon, écran plat pour le fils. Vaisselle et cuisine pour le père. Chambre et prière pour la mère. Non, tergiverse le fils en apparté, il n’y a pas de miracle, juste des hommes à part entière : défaillants. Le fils se répète en boucle l’amendement. Ses yeux piquent ; il ne sourira plus à tous les spectacles. Ne sera plus spectateur. […] Rotting Paris. Les images écorchent son insouciance. Ses yeux piquent, mais le fils les garde ouverts, car c’est à bien voir qu’on devient grand. Il le sait – si, si, il le sait – et de petites piqûres en petites larmes, du couloir au salon, il s’éloigne de son enfance. Il éteint l’écran plat et découvre, dans le reflet, que ses yeux brûlent de le voir adulte à présent. »

2 commentaires:

  1. Je plus de mal à accrocher sur la partie au Cameroun aussi, peut-être parce que c'est plus loin de notre vie ? Par contre, j'ai trouvé que les sentiments étaient quand même bien rendus en particulier dans la dernière partie.

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    1. C'est vrai qu'à partir du moment où les deux personnages se rencontrent il y a davantage d'émotions et de densité dans l'histoire.

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