samedi 12 avril 2014

Ta mort sera la mienne, de Fabrice Colin : trois destins, une tragédie

[Sonatine, 2013]

Comme promis lors de mon précédent billet sur son roman pour adolescents « Passeurs de mort », on termine cette semaine comme on l’a commencée, en compagnie de Fabrice Colin ! On change radicalement de genre puisque nous sommes ici en présence d’un thriller, qui est sans aucun doute le plus glaçant des deux policiers qu’il a publiés chez Sonatine. Par ailleurs, Bookenstock consacre en ce moment son « mois de » à cet auteur, allez y jeter un œil, Fabrice Colin répond aux questions des lecteurs au jour le jour, c’est très intéressant ! C’est par ici.

Résumé

Aux Etats-Unis, dans la vallée du Moab, des étudiants en écriture créative et leurs professeurs sont réunis dans un complexe hôtelier, à l’occasion d’un séminaire de littérature. Le séminaire n’aura jamais lieu puisqu’un motard vêtu de noir des pieds à la tête fait irruption sur les lieux et tire à vue. Troy n’a aucune pitié et ne s’arrêtera pas avant d’avoir trouvé la personne qu’il cherche. Karen, la conseillère d’éducation du groupe, persuadée de connaître le tueur, se réfugie dans son bungalow en compagnie d’une étudiante. Enfin, Donald, un vieux policier désabusé, se lance avec son équipe dans une course contre la montre.

Trois trajectoires…

J’ai beaucoup apprécié ce roman à trois voix. Nous avons en alternance des chapitres centrés sur Karen (à la 3e personne), sur Troy (à la 2e personne) et sur Donald (à la 1ère personne). Pour chacun d’entre eux, une évocation de leur passé se mêle au récit de la fusillade, et des connexions se dessinent entre eux. L’histoire de Karen est celle d’une femme qui a toujours voulu aider les autres, mais qui a cherché dans de mauvaises directions. Celle de Donald est dominée par un sentiment d’échec et de culpabilité, même s’il a trouvé un semblant de paix dans la sagesse indienne. Quant à Troy, son histoire est celle d’une enfance martyre, sur une île à l’abri des regards, dans les griffes d’une secte.

…une fusillade

Le lecteur découvre donc le passé des trois personnages, mais il est régulièrement et brutalement rappelé à la réalité de la fusillade, qui nous est livrée avec beaucoup de réalisme et des airs de fin du monde. Ames sensibles s’abstenir ! Nous en avons toutes les facettes : il y a d’une part ceux qui se cachent, qui essaient de s’échapper (et nous pauvres, lecteurs, ne pouvons-nous empêcher d’espérer avec eux), et d’autre part la quête du tireur, méticuleux, extraordinairement calme. En lisant ce roman, on ne peut s’empêcher de penser à la fusillade qui a eu lieu sur l’île d’Utoya en Norvège en 2011, et cette rencontre entre l’imaginaire et le réel fait froid dans le dos.

Les personnages

Etrangement (mais pas tant que ça finalement, au vu de la construction du roman), le personnage auquel je me suis le plus attachée, c’est celui du tireur. On ne peut qu’éprouver une forme de pitié envers cet homme qui a vécu l’horreur lorsqu’il était enfant, et en qui on a profondément ancré l’idée d’une fin du monde imminente. Malgré ses actes terribles, ses intentions sont pures. J’ai également éprouvé de la sympathie pour Donald, sa culpabilité et sa quête désespérée de paix. J’ai eu plus de mal avec Karen, qui s’est obstinée à ne rien comprendre et qui a cru pouvoir réparer ses erreurs sans vraiment se remettre en question.

L’écriture

Dans ce roman, je n’ai pas retrouvé le style habituel de Fabrice Colin. Ici, sa plume est plus directe, les phrases sont plus courtes. Il colle à l’état d’esprit de son tueur en gommant l’émotion, il y a une sorte de froideur qui participe à l’ambiance du roman. Il ne prend pas de gants pour décrire la fusillade ou les sévices qui ont cours au sein de la secte. Même si j’avoue le préférer plus aérien, cette écriture sert à merveille son roman et lui donne du rythme. En revanche, du côté de l’éditeur, pas mal de coquilles à signaler dans ce titre, c’est dommage.

En quelques mots…

Ainsi, c’est un thriller glaçant que nous propose ici Fabrice Colin, qui nous plonge à la fois au cœur d’une fusillade et dans l’engrenage d’une secte. Nous retrouvons, comme dans nombre de ses romans, l’idée d’une fin du monde imminente et de la nécessité de se préparer à la mort. Passé et présent se confondent et vous entraînent toujours plus loin sans vous laisser reprendre votre souffle. A lire si vous appréciez les thrillers et que vous n’êtes pas trop sensible !
Petite info subsidiaire, l'auteur nous promet pour 2015 un 3e policier pour clore sa "trilogie informelle" dédiée au Mal aux Etats-Unis (d'ailleurs, ici, on a de petits clins d'oeil à Blue Jay Way).

Note : 4/5

Stellabloggeuse

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« Ces derniers jours, tu n’écoutes plus qu’une seule chanson. Un hymne létal qui t’appelle à galvaniser ton âme. Les émotions sont néfastes. On te l’a répété des millions de fois et peut-être que, de toutes les choses qu’on a essayé de te faire entrer dans le crâne, celle-ci est la seule qui t’ait réellement aidé. »

« Tu as appris à transformer tes grimaces en sourires et tes poings serrés en mains tendues, à contrefaire le timbre sauvage de ta voix. La colère et la rage qui t’habitent depuis toujours ont atteint de telles proportions que seul un incendie plus ardent encore serait capable d’y répondre. »


« Sur ton CV officiel : mécanicien, agent de sécurité. La ligne manquante ? Fou errant, épris d’un monde prêt à flamber. »

2 commentaires:

  1. ce livre a été ma première rencontre avec l'auteur et j'ai vraiment bcp aimé !

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    1. Oui, je suis allée voir ton billet et j'ai vu ça :) Il m'a beaucoup plu aussi, c'est celui que j'ai préféré entre ses deux thrillers

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