samedi 14 avril 2012

Rencontre avec Flo Jallier à Grenoble

[30 mars 2012, bibliothèque des Eaux Claires de Grenoble, 18h]

Souvenez-vous, en novembre 2011, j’ai eu un coup de cœur pour « Les Déchaînés » de Flo Jallier, son deuxième roman paru aux éditions Sarbacane, dans la collection eXprim’ que vous savez chère à mon cœur. Depuis, je n’ai cessé de vous crier mon amour pour ce roman, et de vous harceler pour que vous le lisiez…
  

Je vous propose aujourd’hui de faire un peu mieux connaissance avec cette auteur, Flo Jallier ayant été invitée à Grenoble dans le cadre du Printemps du Livre. Je n’allais pas rater ça ! La rencontre a commencé de manière un peu chaotique : Flo Jallier, très à l’aise avec le jeune public, s’est sentie intimidée par cette salle « d’adultes ». Elle a donc choisi de sortir du schéma « questions-réponses » pour nous présenter son parcours, avant d’engager une discussion avec le public. Ce qui, à défaut d’avoir obtenu les clés de compréhension de ses romans, nous a permis d’en savoir un peu plus sur elle et sur le message qu’elle porte.

Son parcours

Flo Jallier a fait des études de droit, pour accomplir le rêve de ses parents qui voulaient qu’elle « réussisse ».
Mais elle a rapidement pris un virage à 180 degrés suite à sa rencontre avec un groupe de musique. Elle s’est mise à la batterie et a joué de la musique dans deux groupes, « Les coquines » et « En vrac ». En tant que musicienne, elle a écrit des textes de chanson, et c’est comme cela qu’elle a commencé à avoir envie d’écrire.
Avant cela, des « chocs littéraires » lui avaient donné envie d’écrire : Balzac et Zweig à l’adolescence, puis le Voyage au bout de la nuit de Céline.

Sa manière d’écrire, de travailler

Flo Jallier se définit elle-même comme une « bosseuse », dans la musique comme dans l’écriture. Passionnée par ses activités, elle est capable de passer des jours sans manger, boire ou dormir ! Pour en arriver à ces romans, elle a travaillé 10 ans, c’est un travail de fourmi. En parallèle de ce profil de travailleuse acharnée, elle écrit à l’instinct, à l’intuition, guidée par deux questions : « Qui suis-je dans ce monde ? Pourquoi ? » ?

Dans l’écriture, elle recherche la simplicité, elle essaie d’aller à l’essentiel. Mais avant tout, elle prend du plaisir : avant, elle écrivait pour être publiée, et elle avait perdu ce plaisir d’écrire. C’est finalement en retrouvant le plaisir d’écrire qu’elle a créé de bons romans.

Ses romans et leurs grands thèmes

Les filles ne mentent jamais : Ce roman se passe entre les années 1970 et les années 2000, dans  la banlieue parisienne et raconte le quotidien de quatre jeunes femmes, chacune s’exprimant tour à tour. Cette première histoire lui a permis d’aborder les violences faites aux femmes. Elle a mis en scène des femmes qui ont des vies difficiles, mais qui s’en sortent malgré tout.


 Les Déchaînés : Pour le résumé, je vous renvoie à ma chronique. Pour Flo Jallier, le but de ce roman, c’est d’apprendre à dire non, un non qui marque le début de la liberté. Il lui a également permis d’aborder l’histoire antillaise, une histoire qui selon elle n’a pas été « digérée » par la France. Elle a souhaité remonter le temps, pour mieux comprendre ses origines. Pour Flo Jallier, l’Histoire et les commémorations sont importantes : il faut savoir ce qui s’est passé, pour mieux comprendre et en réparer les blessures.   
  
Un message à faire passer : la liberté

Durant cette rencontre, Flo Jallier nous a surtout parlé de liberté. Elle estime en effet qu’en 2012, on a encore besoin de parler de la liberté. Le livre n’est pour elle qu’un support pour délivrer ce message.

Mais qu’est-ce que la liberté ? Pour Flo Jallier, la liberté ne signifie pas faire ce qu’on veut, mais chercher comment se réaliser et pouvoir s’épanouir. La liberté est cadrée, nous vivons tous dans un système : la vraie liberté est d’abord intérieure.

Au-delà de cette liberté, elle souhaite aussi parler du rêve, du plaisir, de l’urgenceécologique, et de la violence que chacun de nous porte en lui.

La jeunesse

Flo Jallier s’adresse particulièrement aux jeunes lorsqu’elle écrit. Aujourd’hui, les jeunes ne savent pas ce qu’ils veulent faire de leur vie, quels sont leurs rêves. Ils ne pensent pas à rêver, c’est une génération angoissée, qui baigne dans la crise, le chômage. Elle veut donc leur dire de prendre conscience de leurs possibilités et de faire ce dont ils ont envie, en prenant du plaisir. En apprenant à se connaître, ils pourront mieux affronter le monde. L’important, c’est de se trouver, au risque d’être différent, d’être un peu marginal. Mais apprendre à se connaître permet aussi de mieux appréhender les autres.

Ainsi, le message qu’elle souhaite délivrer aux jeunes générations pourrait se résumer ainsi :travaillez pour vos rêves, pour les réaliser et vous accomplir.

La violence

Si Flo Jallier insiste autant sur la liberté  et sur la nécessité de vivre en adéquation avec soi-même, c’est que la négation de soi entraîne selon elle une frustration qui débouche sur de la violence. Quand on vit dans le secret, le non-dit, que l’on est privé d’informations sur ses origines, on ne peut se construire, on est bancal.
Pour Flo Jallier nous avons tous de la violence en nous, dont il faut prendre conscience. Sur ce thème, elle nous conseille « Carnage », un film de Roman Polanski.

Et l’amour dans tout ça ?

Pour Flo Jallier, l’amour est un moteur, il fait avancer. Les individus ont besoin de savoir qu’ils sont issus d’un amour, la quête des origines est importante pour cela. Le manque d’amour conduit à la frustration et à la violence évoquées ci-dessus. La phrase « dans le plus terrible des hommes se terre l’enfant mal aimé » est récurrente dans les Déchaînés, un message on ne peut plus clair.

En résumé ?

Pendant cette rencontre, nous avons parlé de liberté, de violenced’amour, des vraies discussions de société qu’il serait bon d’avoir plus souvent. Flo Jallier est une femme passionnée et profondément révoltée, admirable pour la force de ses convictions. Dans la salle, on a bien retenu le message : il serait temps d’essayer de nous accomplir en tant qu’individu avant de courir après une image idéale, celle que la société attend de nous. A méditer !
Merci à la bibliothèque des Eaux Claires pour l’organisation de cette rencontre !


Stellabloggeuse

6 commentaires:

  1. J'ai encore plus envie de découvrir les déchainés maintenant ! Il ne t'est pas venu à l'idée de le faire voyager ?

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    1. Je dois avouer que je tiens à ce livre comme à la prunelle de mes yeux et que je serai trop inquiète de le faire voyager. J'ai confiance en les bloggueurs mais à la Poste, beaucoup moins, j'aurais trop peur qu'il soit perdu ou tout corné (je suis un peu maniaque sur les bords^^) !

      Il me semble que pas mal de bibliothèques l'ont acheté par contre, il était en "coup de coeur" dans un certain nombre de librairies et de critiques littéraires.

      En tout cas, si je t'ai donné envie, je suis contente :D

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  2. Voilà un billet vraiment intéressant et j'ai failli le louper !
    J'aime beaucoup toutes les idées en vrac de cet auteure,même si je pense qu'elle se trompe quand elle parle "des jeunes"... Je les cotoye tous les jours et ce n'est pas vrai que "les jeunes ne savent pas ce qu’ils veulent faire de leur vie, quels sont leurs rêves. Ils ne pensent pas à rêver, c’est une génération angoissée, qui baigne dans la crise, le chômage." Vraiment, je pense qu'elle se trompe. Ils ont des rêves. Quant à savoir ce qu'ils veulent faire de leur vie, ça ne date pas d'hier cette difficulté des jeunes à se projeter dans l'avenir... j'ai moi-même choisi mon université (et donc ma vocation, mon métier)..... la veille de la rentrée universitaire.

    Bref, je m'égare ! Merci pour ce très joli billet, j'adore en apprendre plus sur les auteurs ^^

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    1. Merci Cajou :) Pour ce qui est de "génération angoissée", à titre personnel cela me parle, que ce soit au lycée ou maintenant je n'ai pas eu de "rêve" dans le domaine professionnel, et cet aspect de la vie reste encore source d'angoisse et de pression pour moi. Ce sera sans doute ainsi tant que je ne serai pas "fixée".

      Mais effectivement cette idée peut être discutée, et toi qui côtoie des jeunes chaque jour, tu aurais eu des choses à dire ! C'est ce qui s'est passé dans la salle ce soir-là, il y a eu échange et débat avec le public. Malheureusement c'est dur à retranscrire dans un billet, et j'ai juste essayé de donner ici le plus fidèlement possible le point de vue de Flo.

      Merci pour ton message et bon dimanche !

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  3. Je dois t'avouer que je suis très touchée par "le message" délivré par Flo Jallier, tout cela sonne très vrai pour moi... Depuis petite je passe pour quelqu'un d'étrange parce que, eh bien... "différente", pas la même manière de penser, de voir les choses, et j'ai la chance d'être dans une famille encourageant fortement ce penchant (horreur pour une certaine catégorie de l'entourage qui veut être tout ce qu'il y a de plus "normal" ! :D) donc ça fait beaucoup de bien de lire tout cela... sur ce, je retourne à ma lecture, t'en ai-je parlé ? Je crois que tu connais... quelque chose comme... Les Déchaînés, me semble-t-il :p
    Je t'embrasse et te souhaite un très beau dimanche :)

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    1. Ce livre me dit vaguement quelque chose oui... :p J'espère qu'il te plait et je suis ravie que le livre soit tombé sur toi qui adhère à ce message :) Bonne lecture ma chère ! Gros bisous !

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