samedi 3 novembre 2012

Les bourgeoises, de Sylvie Ohayon : des portraits de femmes qui s’empêchent de vivre


Il y a quelques mois, j’avais découvert et apprécié le premier roman de Sylvie Ohayon, intitulé « Papa was not a Rolling Stone ». Elle y racontait de manière romancée son enfance à la Courneuve, à la cité des 4000, un sein d’une famille juive tunisienne. Aussi, lorsque l’occasion s’est présentée de lire son second roman, qui en est en quelque sorte la suite, grâce à l’opération « Masse critique » de Babelio, je n’ai pas hésité.

Résumé

Dans ce second roman, nous retrouvons l’auteur en pleine ascension sociale dans le milieu parisien de la publicité. Cette ascension, elle nous la raconte au travers des portraits des bourgeoises dont elle croise la route. Si elle en méprise certaines, d’autres lui font comprendre que l’on n’est pas forcément plus heureux dans le confort matériel. En filigrane, nous suivons l’évolution de l’auteure, qui a bien du mal à être en paix avec elle-même.
Des portraits au vitriol

Nous n’avons donc pas ici une intrigue qui se déroule de manière linéaire, mais plutôt une série de portraits, qui nous permet de retracer peu à peu l’évolution de l’auteure. Chaque bourgeoise a son chapitre. Celles décrites en premier sont celles qui ont eu droit au mépris de l’auteure, qui ne mâche pas ses mots envers elle. Mais peu à peu, Sylvie Ohayon s’adoucit et améliore sa compréhension de ces femmes qui ont une existence à part, très (trop) balisée, qui subissent toutes sortes de pression, qui manquent de choix, qui doivent garder la face en toute circonstance.

Une soif de revanche

Si la narratrice traite aussi durement les bourgeoises, c’est qu’elle est animée d’un esprit de revanche, elle qui a manqué de tout. Aussi, au départ, elle en veut à ces filles qui la rejettent et qui ne semblent pas heureuses alors qu’elles ont tout le matériel et l’affectif qui lui a manqué. Puis elle comprend que ces femmes mènent parfois une vie tout aussi difficile que la sienne. Et finalement, celle qu’elle traite le plus durement, c’est elle-même : elle ne cache rien de ses excès, de ses fausses routes, de son goût immodéré pour l’argent et les belles choses. Elle se débat avec ses envies, ses contradictions, son judaïsme, son sentiment d’insécurité. Elle tente de trouver la paix.

Les personnages

Dans ce contexte, il n’est pas facile de s’attacher aux personnages dont les défauts nous sont exposés si crûment. La narratrice elle-même ne se montre pas sous son meilleur jour. Ainsi, finalement, les personnages que j’apprécie le plus sont ceux qui ont déjà été développés dans le premier roman de l’auteur : sa famille juive tunisienne, et notamment son irremplaçable grand-mère, Margot, qui a toujours le bon mot et soigne tous les maux à coups de nourriture grasse et de tendresse.

L’écriture

Dans ce roman, j’ai retrouvé l’écriture de Sylvie Ohayon telle que je l’avais déjà appréciée auparavant : directe, percutante, un brin cynique. Peut-être un peu plus crue qu’auparavant. Néanmoins, la fraîcheur du premier roman m’a un peu manqué, j’ai trouvé celui-ci plus désabusé, recelant un humour plus noir. Mais j’apprécie toujours son franc-parler et son absence de complexes.

En quelques mots

Ainsi, j’ai apprécié ce nouveau roman autobiographique. Ne vous attendez pas à une histoire complète et linéaire, il s’agit plutôt de tranches de vie, de descriptions de caractères. L’aspect psychologique est intéressant, même si davantage de fraîcheur et de légèreté auraient parfois été les bienvenues.
Merci à Babelio et aux éditions Robert Laffont pour m’avoir permis de découvrir ce titre !

Note : 3,5/5

Stellabloggeuse
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 Ce roman appartient au challenge :
  

Bouge ta PAL : lecture n°1
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« Petite, je ne voulais pas me contenter du peu que j’avais reçu et aujourd'hui, tu me vois, avec mes diplômes en bandoulière, je ne suis jamais contente. Pour être heureux, il faut se suffire à soi-même. Rien ne me satisfait vraiment, et tu sais pourquoi ? Parce qu’il me manque la moitié de moi, je n’ai pas connu mon père, il n’a même pas pris le temps de me faire une chanson pour me dire au revoir. Il n’est pas revenu, je n’ai même pas pu lui pardonner son absence. »

« La pierre, elle ne se soucie pas d’être toujours immobile, jamais il ne lui vient l’idée de changer de paysage. La pierre, elle vit sa vie tranquille sans penser au lendemain. Mais l’enfant empêchée, celle qui découvre à la télé un autre monde plus beau, d’autres petites filles mieux habillées avec un parent dans chaque main, la gamine à qui on tend un théâtre fastueux, des tentures dorées et pourpres, elle est comme Hansel et Gretel, elle cesse de réfléchir parce qu’elle a fait une overdose de moche et de privations et elle se jette en souriant dans cette vie nouvelle faite de papier et de friandises glacées. Quitte à verser des larmes de sang après, quitte à payer au prix fort son erreur, celle d’avoir convoité l’herbe plus verte du voisin pour mettre du doux sous ses pieds nus. Avant de devenir un Homme, il faut avoir été un âne. »

2 commentaires:

  1. Bon le premier "tome" est dans ma wish, celui-ci me convainc qu'il doit en sortir :D

    Bisous

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    Réponses
    1. Ah oui, il est vraiment bien "Papa was not a Rolling Stone" :)

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