[Marabout, 1991]
Cela faisait longtemps que je souhaitais découvrir « Dracula » de Bram Stoker, le grand classique de la littérature vampirique. Une envie renforcée cet été par ma lecture d’une version détournée de ce roman « Dracula mon amour » de Syrie James. Si je n’avais pas beaucoup apprécié ce titre, j’étais très désireuse de connaître la VRAIE version. C’est maintenant chose faite, grâce à l’adorable Arcaalea qui m’a offert ce livre à l’automne, et à l’organisation par mes soins d’une lecture commune sur le forum Dark Ambiance.
Résumé
Ce roman épistolaire rédigé sous forme de journaux intimes débute par le voyage de Jonathan Harker en Transylvanie. Le jeune homme doit en effet aider un certain Comte Dracula à acheter une propriété en Angleterre. Mais très vite, il est confronté à d’étranges phénomènes qui le terrifient. Pendant son absence, sa fiancée Mina part en vacances avec sa meilleure amie, Lucy, sur les côtes anglaises, à Whitby. Là aussi, les phénomènes étranges se multiplient : somnambulisme, extrême paleur et fatigue de Lucy… Et si tout cela était l’œuvre d’une seule et même créature maléfique ?
Un classique du fantastique
Ce roman est un classique du fantastique. Il est centré autour d’un vampire (je ne pense pas spoiler en vous révélant cela), capable de se transformer en diverses créatures, capable d’influencer les éléments, pouvant être repoussé grâce à de l’ail ou des objets religieux. Ce roman a véritablement fondé le mythe du vampire, et en cela il est très important. En revanche, ne vous attendez pas à quelque chose de spectaculaire : il s’agit de fantastique « classique », c’est-à-dire basé sur le mystère et la suggestion. Vous n’aurez ni grandes descriptions sanguinolentes, ni une description très précise de la créature. L’auteur créé avant tout un climat de tension et de peur.
Cette histoire met aussi en lumière l’état de la psychanalyse à la fin du XIXe siècle, ainsi que les progrès de la médecine, puisque nous voyons le professeur Van Helsing effectuer des transfusions de sang. Mais malgré ces avancées technologiques, la religion a la part belle dans la lutte contre le comte Dracula.
Quelques regrets
Bien que ce roman soit fondateur pour le genre fantastique, on peut regretter un certain nombre de choses à la lecture. Ainsi, à cause de la forme du journal intime, l’intrigue est très lente, chaque personnage décrivant en détail ses sentiments, ses réactions, ce qu’il a fait dans la journée. De plus, le combat contre Dracula a une forte dimension religieuse, à laquelle je n’ai pas franchement adhéré. Enfin, cette histoire a vieilli : l’image de la femme qui est présentée ici m’a parfois hérissé les cheveux sur la tête, en voici un exemple :
« Ah ! L’étonnante madame Mina ! Elle a véritablement le cerveau d’un homme – d’un homme qui serait extraordinairement doué – mais un cœur de femme ! Croyez-moi, Dieu avait une intention particulière quand il l’a façonnée ».
Les personnages
En ce qui concerne les personnages, ils sont sympathiques, mais n’ont pas particulièrement de relief. Ce sont « des gens bien », soucieux du salut de leur âme et prêts à se sacrifier les uns pour les autres. Néanmoins le personnage de Renfield, un pensionnaire de l’asile d’aliéné, est très intéressant. Mon principal regret, c’est que le personnage de Dracula est finalement très peu présent : on ne le connaît pas, on le voit deux ou trois fois dans le roman, et uniquement à travers les yeux des autres personnages. Bref, il m’a manqué un vrai personnage de méchant, dans toute sa complexité et sa psychologie.
L’écriture
Concernant le style, il n’y a rien à redire, ce monsieur savait écrire. D’ailleurs, pour un texte classique, il est étonnamment facile à lire, rien de trop alambiqué. C’est presque dommage, quand je lis un classique je m’attends parfois à ce que ce soit plus travaillé. Il y a aussi des répétitions dans l’intrigue, à cause des journaux intimes des différents personnages. Enfin, cette forme de journal intime me semble assez artificielle : comment en effet une personne pourrait-elle se rappeler si précisément des dialogues qu’elle a eus dans la journée ? Néanmoins, c’est un texte agréable à lire.
En quelques mots…
Ainsi, je suis heureuse d’avoir lu ce roman car j’estime qu’il s’agit d’un classique fondateur du fantastique et de la mythologie des vampires. De même, l’intrigue est bien menée. Néanmoins c’est un texte qui a vieilli, avec une omniprésence de la religion et un rôle de la femme semblant dépassés aujourd’hui. Mais mon principal regret reste le personnage de Dracula que l’on n’apprend finalement pas à connaître. Cependant, tout amateur de fantastique a sans doute envie de découvrir ce roman, et il est à connaître.
Note : 3/5
Stellabloggeuse
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Ce roman fait partie des challenges :
Challenge ABC 2013 : 1/26
Où sont les hommes ? : lecture n° 25
Bouge ta PAL ! : Lecture n°16
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« Ah ! John, mon ami, vous ne me comprenez pas ! Ne pensez pas que je ne suis pas triste parce que je ris. Je pleurais alors même que j’étouffais à force de rire ! Mais n’allez pas croire non plus que j’éprouve seulement de la tristesse quand je pleure… N’oubliez jamais que le rire qui frappe à votre porte et qui demande « Puis-je entrer ? » n’est pas le rire véritable. Non ! C’est un roi, et il vient chez vous quand ça lui plaît et comme ça lui plaît ! Il n’en demande la permission à personne ; seul son bon plaisir importe. »
« Ses yeux flamboyaient de colère ; les larges narines du nez aquilin s’ouvrirent plus grandes encore et palpitaient ; les dents blanches et pointues que l’on entrevoyait derrière les lèvres gonflées d’où le sang dégoulinait, étaient prêtes à mordre comme celles d’une bête sauvage. D’un mouvement violent, il rejeta sa victime sur le lit, se tourna tout à fait et bondit sur nous. Mais le professeur, maintenant debout, tendait vers lui l’enveloppe contenant la Sainte Hostie. Le comte s’arrêta net, comme Lucy l’avait fait à la porte de son tombeau, et recula. Il ne cessa de reculer, devenant, eût-on dit, de plus en plus petit, tandis que nos crucifix en main, nous avancions vers lui. Soudain, un gros nuage noir couvrit la lune, et quand Quincey donna de la lumière, nous ne vîmes plus rien d’autre qu’une légère vapeur. »
Reste que si la version que vous avez lu est celle dont la couverture illustre votre billet, il y a fort à parier que vous ayez perdu quelque peu la plume originale, étant donné que la traduction de Lucienne Molitor est une des pires qui soit, qui prend de grosses libertés avec le matériau d'origine.
RépondreSupprimerEt Stoker s'écrit sans c ;)
La version dont la photo illustre mon billet est celle que je possède au format papier, mais il se trouve que j'ai finalement lu Dracula en format e-book, il faudrait que je vérifie le nom du traducteur de ce dernier. Ceci dit, je n'ai rien à reprocher à la plume. J'ai surtout été déçue de la faible présence de Dracula lui-même, au final.
SupprimerQuant à la faute d'orthographe, je l'ai toujours écrit avec un "c", merci de m'avoir ouvert les yeux, je vais pouvoir corriger ça de suite ;)
J'avais beaucoup aimé découvrir le vrai Dracula mais c'est vrai que la façon dont l'auteur parle des femmes m'avait aussi hérissée ! Surtout que c'est Mina la plus intéressante dans l'histoire !
RépondreSupprimerLe côté religieux de la vision de la femme offerte dans ce livre est sans doute l'un des aspects qui m'a le plus agacée. Quant à ce type de journal intime, ça a beau être peu crédible, j'ai aimé la reconstitution des dialogues et tout ce qui va avec, je te l'avoue :D Par contre, la fin m'a semblé vraiment en dessous de la première partie, tellement réussie à mon sens ! Bref, comme tu le dis : un classique à connaître, même si je lui ai trouvé des défauts parfois énormes :D
RépondreSupprimerOui, la fin donne l'impression d'être un peu bâclée, on se dit "tout ça pour ça". Mais je suis très contente d'avoir pris mon courage à deux mains pour le découvrir enfin !
SupprimerOn a des ressentis similairers même si à 15 ans quand je l'ai lu pour la première fois il m'avait bien plus parlé mais forcément, je dirai. Midinette, peu de vampires à la TV...
RépondreSupprimerN'oublions pas que nous sommes à l'époque romantique et moi ce sont ces hommes qui pleurent qui m'ont agacée xD L'image de la femme, de la dévotion oui tout ça aussi... Donc la relecture était moins bonne. A l'époque en revanche, ça a dû bouger dans les chaumières xD Tu peux te pencher sur les légendes slaves qui sont plus proches du vrai mythe vampirique sinon :p
Bisouus
Ah oui, les hommes qui pleurent, c'est vrai que c'est pas très séduisant ;)
SupprimerJe suis FAN de cette couverture !! J'ai toujours adoré les vieux livres avec leurs vieilles couv parfois kitsch certes mais... Celle-là m'avait tapé dans l'oeil :)
RépondreSupprimerJe trouve ta chronique intéressante et je pense en effet qu'il est bien d'avoir lu une fois dans sa vie ce livre, c'est un classique !
Mais bon... Comme tu dis la femme y tient une place qui peut agacer, et à mon sens il y a beaucoup trop de passages où on s'ennuie pour finir par une scène de fin baclée...
Gros bisous et je suis contente d'avoir pu te faire découvrir cette oeuvre :)
Merci encore Arca :) C'est vrai qu'il y a des longueurs et que la fin fait un peu "pchit" ;) Mais je suis contente d'avoir ajouté cette petite pierre à ma culture. Bisous !
SupprimerTrès bonne critique et très constructive ! Rien que pour ça je vais reprendre la lecture de ce roman qui, je l'avoue, m'a un peu rebuté par sa longueur, et le terminer ! Merci à toi
RépondreSupprimerMerci :) C'est vrai que ce roman s'étire en longueur, qu'il n'a pas beaucoup de rythme, mais c'est le fondateur de tout un genre littéraire
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