Confusion, de Cat Clarke : une histoire bien menée sur le mal-être et le secret

[Robert Laffont, 2012]

Eh oui, je continue à faire connaissance avec la Collection R des éditions Robert Laffont ! Vous avez pu remarquer un certain nombre de critiques de titres de cette collection sur le blog ces derniers mois, et ce n'est pas un hasard : le catalogue est alléchant et les romans de qualité, jusqu'à maintenant, aucun titre ne m'a déçue. De fait, j'ai sans cesse envie d'en découvrir un nouveau, et ce mois-ci c'est l'opération Masse Critique de Babelio qui m'a permis de partir à la rencontre d'un nouveau titre : "Confusion", de Cat Clarke, pour mon plus grand plaisir. Sans compter que pour une fois, c'est un "one shot", et non une série !

Résumé

Après avoir voulu, sans succès, mettre fin à ses jours, Grace se trouve enfermée dans une pièce, avec pour seule distraction une pile de feuilles blanches et des stylos à profusion. Ethan, le mystérieux garçon qui la retient en otage, insiste pour qu'elle déroule sur le papier l'écheveau des derniers mois de sa vie, ses espoirs, ses déceptions. Dans quel but, elle ne le sait pas, mais pressée par une sorte d'urgence, elle reconstitue peu à peu le lent déclin de sa relation avec sa meilleure amie, Sal, et les balbutiements de sa première véritable relation amoureuse. Parviendra-t-elle à temps à mettre le doigt sur la vérité, sur ce qui a tout fait basculer ?

Une intrigue bien menée

Pour commencer, j'ai apprécié la construction du récit, en partant d'une situation et en découvrant peu à peu comment Grace en est arrivée là, à la manière d'un puzzle. Le récit des souvenirs de Grace est entrecoupé par sa vie de prisonnière, et de ses tentatives pour comprendre qui est Ethan et où il veut en venir.Le tout est bien pensé et plutôt bien mené, j'ai simplement regretté que l'on voie un peu trop les "ficelles" : j'ai assez vite compris vers quel type de fin l'auteure souhaitait nous mener. Il n'empêche que cette fin est forte, et que malgré son côté prévisible, le récit reste addictif, j'étais avide de savoir comme les choses allaient se dérouler, et j'ai été émue à quelques reprises.

Deux thèmes phares : le mal-être et le secret

Cette histoire est donc narrée d'une manière originale qui m'a séduite, mais n'a elle-même rien de très novateur : nous découvrons la vie d'une lycéenne anglaise durant les vacances d'été, le déclin d'une amitié, la naissance d'un amour. Mais derrière cette histoire en apparence banale surgissent deux thèmes que l'auteure semble avoir à coeur : celui du mal-être adolescent, pouvant mener jusqu'au suicide, et celui du secret, capable de gâcher des vies entières. Cat Clarke aborde également le deuil, en nous dépeignant une famille en lambeaux. J'ai apprécié la présence de ces thèmes, abordés dans le récit de manière intelligente.

Les personnages

Si l'histoire m'a emportée, j'ai mis du temps à apprécier le personnagede Grace. Elle apparaît tout d'abord comme une adolescente fêtarde et délurée, assez égocentrique et ayant du mal à admettre un point de vue autre que le sien. On la voit par exemple tenter d'imposer sa conception de la vie à sa meilleure amie, Sal. De même, sa manière d'aller trop loin avant de se rétracter avec un "je plaisantais" ne me plaisait pas beaucoup. Ce n'est finalement qu'en découvrant ses failles et le traumatisme à l'origine de son attitude que j'ai commencé à être un peu moins dure avec elle et à la prendre en pitié. Au final, on comprend qu'elle peut être une bien meilleure personne, au fond d'elle, si elle arrive à s'en persuader. C'est un personnage complexe, que l'on prend plaisir à apprendre à connaître.

Quant aux personnages secondaires, on comprend très vite qu'ils cachent quelque chose sous leurs dehors sympathiques. Je n'ai pas réussi à apprécier Sal, même si on sent que malgré tout elle aime sincèrement Grace. Quant à Nat, bien que le sentant faux, je n'ai pas pu m'empêcher de l'apprécier, de caresser un mince espoir que les choses s'arrangent...mais vous savez que je suis une incorrigible midinette !

L'écriture

En revanche, l'écriture m'a quelque peu déçue. Elle reste tout à fait correct et agréable, mais ayant affaire à une introspection intime, avec une dimension psychologique, je crois que j'attendais un style plus travaillé, notamment dans les passages lors desquels Grace réfléchit sur elle-même. Il m'a également semblé que ce roman manquait un peu de descriptions. Mais cela reste un moment de lecture agréable, je crois simplement que j'en attendais trop.

En quelques mots...

Ainsi, la collection R et Cat Clarke nous proposent ici un roman à la construction originale, évoquant de manière intelligente le mal être adolescent et mettant le lecteur en garde contre le poids et la dangerosité des secrets. Malgré quelques bémols, c'est un roman qui a su m'emporter et qui possède une fin forte.

Un grand merci à Babelio et à l'opération Masse Critique pour cette découverte !

Note : 3,5/5 (en vérité, c'est davantage un 3,75, mais je ne m'autorise pas les quarts de point !)

  

Stellabloggeuse

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Ce roman fait partie des challenges :

Bouge ta PAL ! : lecture n°11

Challenge 100 % R : 5e lecture

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« Est-ce que je dois partir ?... Comment pourrais-je avoir envie de retrouver cet espèce de colossal tas de merde qu’étais ma vie ? Rien n’aura changé. Je me demande comment ils se sentent, en ce moment. J’imagine qu’ils doivent être contents que je sois partie. Ça leur facilite sûrement beaucoup les choses. Ils seront sans doute (ou feront mine d’être) bouleversés un temps, mais je pense que ça leur passera vite. »

« C’est lorsque je suis seule que le doute s’insinue. C’est comme ça depuis des années. Tant qu’il y a des gens autour de moi, je fais comme si tout allait bien. Mais j’ai besoin d’un public à qui jouer la comédie pour que cela marche. Seule avec moi-même, je me berne moins facilement. Ce n’est pas que je redoute la solitude, pas vraiment. J’arrive toujours à me distraire en rêvassant comme une abrutie, mais au final, j’en reviens systématiquement à moi. La seule chose qu’il me reste : moi, et seulement moi. Alors que c’est justement ce dont j’ai le plus peur. Moi. Et les idées noires que je tente d’évacuer en me coupant. Les souvenirs qui paraissent un peu plus bruyants et lumineux à mesure que j’essaie de les oublier. Les pourquoi et les si. Et, tapie quelque part au fond, attendant de me mettre à terre chaque fois que tout semble enfin bien aller, la pensée – la certitude – qui me brise le cœur : mon père aurait honte de la personne que je suis devenue. »