vendredi 10 février 2012

La réparation, de Katia Gagnon : une enquête journalistique et humaine

[Boréal, 2011]
  
Envolons-nous cette fois pour le Canada, avec le premier roman d’une journaliste québécoise, Katia Gagnon. Dans ce livre, elle met en scène Marie Dumais, une journaliste spécialiste des questions sociales, des dossiers sensibles. Son patron lui demande d’enquêter sur le suicide de Sarah, une jeune fille de 16 ans, qui était victime d’intimidation dans son lycée. Elle cherche à connaître la vérité, à découvrir les raisons qui ont poussé Sarah à effectuer ce geste, en espérant ainsi venir en aide à d’autres adolescents en difficulté.

En parallèle, nous avons une autre histoire, qui se déroule dans les années 1980, au moment de la mise en place des services sociaux à Montréal. La toute jeune Direction de la Protection de la Jeunesse est confrontée au cas difficile d’une petite fille de cinq ans à qui sa mère n’a jamais adressé la parole, et qui n’est jamais sortie de son appartement. Les deux histoires sont liées, d’une manière que vous découvrirez si vous lisez ce livre…

Si l’on s’en tient aux apparences, la couverture m’a plu, j’ai bien aimé son illustration. Et à l’intérieur, j’ai beaucoup apprécié ce roman, qui n’est pas du tout lourd, comme son thème pourrait le laisser supposer. Le lecteur se laisse rapidement prendre par l’enquête menée par la journaliste, il veut savoir le fin mot de l’histoire, et les pages se tournent toutes seules.

Découvrir les coulisses du travail d’une journaliste m’a bien plu, on voit l’analyse que Marie tire de ce que lui disent les gens. La mise en place des services sociaux au Québec était également intéressant. Le thème de l’intimidation dans les établissements scolaires est bien exploité, on retrouve le collège que l’on a connu avec sa hiérarchie, ses modes vestimentaires, ses moutons noirs.

Le personnage de Marie est plutôt attachant, elle fait son métier de journaliste, réalise ses investigations avec une certaine humanité, en respectant les gens, mais en adoptant parfois une distance humoristique assez agréable. On comprend également peu à peu qu’elle a des failles, elle est touchante.

Du point de vue formel, le roman est bien construit, divisée en trois grandes étapes, qui sont cohérentes pour les deux histoires développées. Les deux parties de l’intrigue se répondent très bien. L’auteur varie également les formes, avec des rapports de psychologue, d’éducatrices, etc.

Quant au style, il est assez simple. Il n’y a pas de grandes phrases, pas de tournure tarabiscotée, mais l’écriture est agréable et efficace, elle va droit au but. C’est une caractéristique que j’ai remarquée dans plusieurs romans québécois. Et bien sûr, il y a le côté pittoresque des expressions québécoises, certains mots ont du charme, tels que « clavarder », pour dire « chatter sur Internet ».

Si j’ai quelques bémols à apporter, je dirais que certains points de l’intrigue sont assez prévisibles, on les pressent dès le départ. L’enquête menée par Marie est peut-être également un peu « facile », il n’y a pas suffisamment d’obstacles sur sa route. Enfin, ce roman n’est pas tout à fait un coup de cœur, il m’a manqué pour cela une petite étincelle, un petit truc qui aurait fait la différence.

Mais ces réserves s’effacent devant le beau message sur la survie que fait passer ce roman, sur la manière dont les gens peuvent se relever de situations désespérées, grâce à leur propre force et à l’humanité de quelques personnes. C’est un excellent premier essai pour l’auteur, un livre qui donne de l’espoir, et cela fait du bien.

Note : 4,5/5
Stellabloggeuse

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« Le Collège Notre-Dame-des-Sept-Douleurs était divisées en castes précises et quasi insurmontables, lui expliqua le prof en phrases hachées et concises. Chez les hindous, ce sont les brahmanes qui trônent au sommet de la hiérarchie des castes. Au collège, les brahmanes, c’était la bande à Florence Dugré. Tous des fils et des filles de notables aisés, qui habitaient le centre historique de la petite ville et se connaissaient depuis qu’ils étaient petits. Et à la base de cette hiérarchie, les Intouchables de Notre-Dames-des-Sept-Douleurs, c’étaient les élèves qui venaient des villages éloignés. Pour la plupart des fils et des filles de cultivateurs. Dès son entrée au collège, le rang de Sarah Michaud avait été clair. Tout en bas. »

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