jeudi 26 avril 2012

L’enfant nucléaire, de Daph Noboby : un conte cauchemardesque gastro-politique qui n'épargne pas le lecteur

[Sarbacane, mars 2012]

Aujourd'hui, je vous emmène sur des terres nouvelles, dans un domaine dont je ne suis pas familière. L’envoi de « L’enfant nucléaire » de Daph Nobody par la collection eXprim’ (que je remercie) m’aura poussée à sortir des sentiers battus et de mes genres de prédilection. Bien qu’un peu hésitante, j’étais prête à me laisser surprendre.

Résumé

Dans ce roman, Daph Nobody met en scène Jiminy Waterson, aux Etats-Unis. Depuis sa plus tendre enfance, Jiminy se montre capable d’ingérer absolution n’importe quoi, sans conséquence sur sa santé à court terme. De la bouteille d’eau de javel au ciment, en passant par les aliments pour chiens. Le secret ? Ses acides gastriques, ultra-performant. Ce « don » fait de lui une cible privilégiée pour les scientifiques. Mais il leur échappe pour vivre dans une décharge, puis partir en quête de gloire avec son ami Alex en réalisant des spectacles époustouflants sans trucage. Pendant ce temps, dans les hautes sphères de l’Etat, quelques Républicains complotent pour chasser leurs homologues Démocrates du pouvoir…

Avis général

On est vite happé par ce roman qui part au quart de tour et ne laisse pratiquement aucun répit au lecteur. Bien qu’un peu décontenancée par l’univers très noir de ce roman, l’intrigue politique m’a rapidement intéressée et m’a permis d’avancer dans ma lecture.

Des messages à défendre

Sous ces dehors « spectaculaires », ce roman aborde bien des sujets cruciaux concernant notre planète, dont certains sont très politiques. Il y a des préoccupations sanitaires et écologiques. Le problème du traitement des déchets nucléaires se trouve notamment au cœur de cette histoire. L’auteur aborde également la consommation de masse, pousse à l’extrême notre penchant à engloutir n’importe quoi pourvu que cela soit « vendeur ». J’ai apprécié de me retrouver confrontée à ces thèmes.

Les personnages

Ce roman possède également une dimension psychologique, nous faisons face à des personnages qui ne parviennent pas à trouver leur place dans le monde. Il y a bien sûr Jiminy, qui doute de son humanité, mais aussi son meilleur ami Alex, toujours en quête d’argent, ou la jeune Leia qui a renoncé à sa féminité. L'auteur aborde ainsi la difficulté d'être différent, de ne pas entrer dans un moule. Chacun de ces personnages est touchant à sa manière, même si on a du mal à s’attacher à eux, car on a l’intuition dès le départ qu’ils sont tous condamnés.

Une intrigue politique

Comme je l’ai déjà évoqué, c’est l’aspect politique de l’intrigue qui m’a séduite. J’ai aimé voir se mettre en place les machinations, les manipulations. L’auteur dénonce la corruption et nous montre de quelle manière les journaux peuvent tour à tour déformer la vérité ou tenter de la rétablir. Il me semble qu’il s’agit-là d’une vision de ce que pourrait être nos sociétés d’ici quelques décennies (ou années) si les citoyens se laissent confisquer la démocratie…

L’écriture

L’écriture de Daph Nobody est très efficace, totalement au service de son roman : cette écriture plante le décor de ce roman noir de manière très efficace. Couleurs, odeurs, texture, tout y est pour que le cauchemar prenne vie. C’est glauque, c’est gore, c’est trash, ça secoue le lecteur ! L'histoire est également truffée de références à la religion ou au cinéma. De manière personnelle, ce n’est pas un genre que j’affectionne, mais il est certain que cette manière d’écrire ravira les amateurs du genre. On ne peut s’empêcher d’être fascinés, emportés.

En quelques mots

Si je devais résumer ce roman en quelques mots, je dirais qu’il s’agit d’un cauchemar éveillé, savamment mis en scène par l’auteur pour dénoncer l’impasse vers laquelle se dirige les sociétés occidentales et quelques-uns des travers de l’humanité.

Il ravira probablement les amateurs de roman noir, mais il peut aussi intéresser et surprendre les non-initiés, si vous êtes capable d’endurer tout cet aspect « trash ». C’est à vos risques et périls ! Ce qui est certain, c’est que « L’enfant nucléaire » vous emmènera loin, très loin…
Pour vous aider, vous trouverez d'autres avis chez BatifolireLes mots de MéloGalleane ou La vie des livres...
Merci aux éditions Sarbacane et à la collection eXprim’ pour leur confiance.

Note : 3/5
Stellabloggeuse
--------

« Quand on ne reçoit pas de caresses, se dit Jiminy, on apprivoise les coups, et les contusions se mettent à revêtir les couleurs de l’arc-en-ciel. On n’existe plus que par les plaies, et le mal devient un jeu. Alors joue, Jiminy ! Joue et souffre ! »

« Les hommes de pouvoir ont toujours peur de l’inconnu. Je dois leur apparaître comme un être trop puissant, car unique au sein de la Communauté des Hommes. Dans une société aussi manipulatrice et aliénante que la nôtre, on doit me considérer comme un danger planétaire, un foyer d’insoumission potentiellement anarchisant, déjà du simple fait que je suis insensible aux drogues que l’on nous injecte à dessein d’accoutumance dans le tabac, les fast-food ou même le lait en poudre… Un être qui ne développe aucune assuétude signifie la mort du capitalisme, non ? Et je pourrais devenir contagieux, qui sait… »

6 commentaires:

  1. Bon ben je ne pensais pas du tout que ce livre traitait d'un tel sujet mais il a l'air intéressant ^^
    Encore un avis bien rédigé ! Bizooo

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci Ayma :) Et oui, ce livre est intéressant si on va au-delà de son aspect trash !

      Supprimer
    2. Ah ben je l'ai reçu la semaine dernière, je me souvenais plus que je l'avais réservé à une fille xD

      Supprimer
    3. Haha ! Et bien bon courage alors :p Ou devrais-je dire : bon appétit !

      Supprimer
  2. Gore, glauque, trash... cauchemar éveillé... métaphore de notre surconsommation effrenée... Je suis vraiment intriguée par ce roman et je pense qu'il pourrait peut-être me plaire par son côté "différent".
    Merci pour ton billet détaillé qui m'a permis de comprendre un peu plus de quoi il était question dans ce livre (les autres billets que j'ai lu parlent majoritairement du gavage d'immondices et point barre)
    Biz

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est vrai que le gavage d'immondices est bien sûr ce qui frappe le plus. Mais si on arrive à passer au-delà, ou si on aime ça, il y a des choses intéressantes derrière. C'est un livre que je peux troquer si jamais cela te tente. Bises !

      Supprimer

A vous de donner votre avis, il est le bienvenu !